A St Pierre et Miquelon, au milieu du XIXe siècle. Une petite communauté française vit loin de la métropole dont elle dépend. On survit dans une atmosphère austère et au climat difficile. Une vie âpre tournée vers la mer et ses fameux bancs de morues.
Quand survient un crime affreux, cruel. L'auteur (Emir Kusturica) est arrêté : il ne nie pas les faits. Il était fin saoul et ne se souvient plus de tout. La justice souhaite faire un exemple et condamne l'homme à mort. Pas à une vulgaire pendaison : depuis la Révolution, la tradition nationale est de raccourcir le corps en lui ôtant la tête à l'aide d'un engin tranchant. "Mais, coupa le gouverneur de l'île : nous n'avons ni guillotine ni bourreau !" Une question que le conseil devra trancher (en plus de la tête, naturellement) !
"Etes-vous sûr que nous ne puissions gracier l'homme ? insiste le gouverneur". "Non ! affirme le conseil."
Donc : courrier à Paris pour exposer le problème, réclamer homme et matériel. Problème, ni FedEx, ni UPS n'affrétaient encore de liaisons transatlantiques à cette époque. Il faudrait encore attendre quelques années avant que le Concorde ne décolle. Des semaines dans un sens, des semaines dans l'autre. Plus le temps aux parisiens de prendre leur décision... Sans compter l'hiver qui allait bientôt figer l'océan et reporter aux calendes grecques la prochaine liaison maritime. Notre condamné allait passer une bonne année en prison avant d'être exécuté. Remarquez qu'il ne devait pas être particulièrement pressé...
La femme du Capitaine (Juliette Binoche) - le Capitaine étant le plus haut gradé de l'île et chef du détachement militaire - a bon coeur et déplore la sentence. Elle demande à son époux (Daniel Auteuil) d'ouvrir la cellule du condamné, de le laisser sortir prendre l'air et de l'utiliser comme homme à tout faire. Fou amoureux de son épouse, il ne peut rien lui refuser. Il a de plus confiance en son jugement. Aussi lui donne-t-il entière satisfaction. Le condamné se rend bientôt indispensable aux riverains en travaillant extrêmement dur : car il est doté d'une force herculéenne, car il est bon et parce qu'il a une dette à payer.
Pendant ce temps, l'île attend la veuve (la guillotine) et cherche à recruter un bourreau. Mais on ne se bouscule pas au bureau d'embauche. Et malgré le fort salaire promis, personne n'accepte le job ! Le conseil est prodigieusement embarrassé : comment vont-ils pouvoir exécuter un homme sans matos, sans personnel, un homme que tous apprécient, le Capitaine et son épouse en tête ?
La veuve de Saint-Pierre est un film pour le moins sinistre, à l'atmosphère pour le moins austère, grise et ventée. Des acteurs au jeu correct mais sans génie pour, au final, un film qui se regarde sans ennui ni passion.
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le 28 avr. 2014

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