Pas forcément aisé de faire l'ouverture d'un festival aussi imposant que celui de Cannes.


Il n'y a qu'à demander à Olivier Dahan et à son piteux Grace de Monaco sortie l'an dernier, pour très vite comprendre que faire l'évènement rime férocement avec décorticage à la loupe et sans la moindre pitié.
Et cela ne fait aucun doute que le nouveau long métrage d’Emmanuelle Bercot, se verra frapper par la même implacabilité de la part de critiques/cinéphiles.


D'autant plus que cette année, grande première, ce n'est plus une super production Hollywoodienne sur laquelle les projecteurs seront braqués en premier, mais bel et bien un petit drame social français, genre ayant déjà majoritairement sa place au sein du calendrier des sorties annuelles.


La Tête Haute, ou l'histoire de Malony et de son parcours chaotique pour se construire dans une réalité sociale des plus complexes.
On le suit de ses six ans jusqu'à ses dix huit ans, plongé dans la délinquance et soutenu par une juge des enfants et un éducateur tentent inlassablement de sauver, deux substituts de famille face à une mère dépassée.


Rien de bien original sur le papier donc, pire même, aux vues de son thème et du physique sec et blond du jeune Rod Paradot, on se disait que ce bon vieux Thierry Frémaux avait presque tenter de nous balancer le même pari fructueux qu'il avait fait lors de la dernière Croisette, avec le magistral Mommy de Xavier Dolan.


Sujet déjà usé ou non, il n'empêche que, outre la figure adolescente, la mise en image des sorties de routes, d'êtres en perte de repères, Emmanuelle Bercot en a fait plus ou moins sa spécialité après le très beau Elle s'en Va - déjà portée par la grande Catherine Deneuve -, et sa présence à Cannes cette année s'inscrit finalement bien plus comme celle de Polisse en son temps, à savoir un film coup de poing nécessaire qui mérite d'être célébré.


Moderne et socialement engagé, La Tête Haute est une douloureuse fable sociale très proche du documentaire dans sa peinture pleine de détresse mais jamais idéalisée du parcours initiatique bouleversant d'un jeune homme tout en souffrance et impulsif, prisonnier d'un système empêchant toute construction et de l'engrenage tortueux de l'autodestruction et de la haine.


Aussi cru, tendu et percutant que poignant et réaliste, le film, habilement mis en scène par une Emmanuelle Bercot impliquée, offre même en prime un joli coup de projecteurs à deux métiers rarement abordés sur grand écran et pourtant si nécessaire, celui d'éducateur et de juge pour mineures.


Mais si la puissance du propos s’essouffle clairement sur la longueur - ses deux heures sont son plus gros défaut - et sous le joug de quelques stéréotypes et répétitions dommageable, et qu'il est très (trop ?) difficile de ne pas le comparer à ses ainés (et bien plus réussi) Polisse et Mommy, le métrage n'en est pas moins un beau et bouleversant moment de cinéma, porté par un casting vedette en tout point remarquable.


Rod Paradot en tête, convaincant en môme écorché vif face à une Catherine Deneuve en tout point merveilleuse dans la peau d'une juge des mineures juste et émouvante, mais également un Benoit Magimel retrouvé et brillant en éducateur.
Même Sara Forestier, affublé d'un dentier pour l'occasion, est épatante en mère dépassée, trop jeune pour assumer son rôle.


La Croisette 2015 commence sur les chapeaux de roues, depuis Minuit à Paris, le festival ne s'était pas trouvé un Vrai bon film pour ouvrir son bal...


Jonathan Chevrier


http://fuckingcinephiles.blogspot.fr/2015/05/critique-la-tete-haute.html

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le 19 mai 2015

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