Est-ce un énième documentaire animalier ? Est ce une de ces sempiternelles adaptations de bouquin à succès ? Ou une réflexion ?


Je ne sais pas ce qu'est finalement La Panthère des Neiges avant d'entrer dans la salle qui le projette avec retard.


Je ne le sais peut être pas plus une heure et demie plus tard.


Car la panthère des neiges du titre ne se montre que très tard, avec parcimonie, sous les yeux et les jumelles d'un duo en constant affût, dans l'attente perpétuelle d'un rêve qui longtemps se dérobe.


La Panthère des Neiges revêt donc plus d'une fois le vêtement de la quête lointaine. De la recherche d'une baleine blanche qui n'est, pour le coup, pas dans son élément naturel.


Les images ramenées de cette extraordinaire épopée entraînent l'oeil du spectateur à s'ouvrir au détail, à réinvestir une dose de merveilleux dans ce qu'il perçoit. A découper la présence animale, à la distinguer de décors tantôt désolés, tantôt magiques. Chaque plan l'invite à discerner, dans la roche, d'anciennes divinités assoupies, d'extraordinaires titans fossilisés, comme si les hauts plateaux tibétains surgissaient d'une préhistoire fantasmée où les dieux, les animaux et les hommes dialoguaient et vivaient en harmonie.


Les images de La Panthère des Neiges exaltent de la même manière un certain ralentissement du temps, une méditation chaloupée sur la place de l'homme dans le monde et son évolution, rythmée par les mots veloutés de Sylvain Tesson, envisageant cet endroit reculé comme un des derniers préservés de la souillure et de l'avidité de l'exploitation.


Et il y a cet animal aussi majestueux qu'insaisissable. Qui épie le chasseur d'images et le chasseur de mots en se refusant à eux. Un véritable fantôme qui hante la montagne et dont la présence irradie pourtant, se devine et se ressent. La rencontre en forme d'instant volé n'en est que plus merveilleuse, tout comme son absence, qui plane sur l'oeuvre, est propice à une mise en avant de la beauté cachée du monde. Une beauté que la musique de Warren Ellis et la voix mélancolique de Nick Cave soulignent et prolongent.


La Panthère des Neiges, comme ces hauts plateaux vierges, est empreint de sublime et d'une sensation d'un hors du temps que l'on a rarement vu aussi joliment mis en images. Et fait réaliser que l'homme est bien peu de chose face au monde, face à sa poésie, sa beauté et sa patience millénaire que l'on a de plus en plus de mal à appréhender, à regarder, à apprivoiser.


Behind_the_Mask, nature loves to hide.

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le 18 janv. 2022

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Behind_the_Mask

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