Note moyenne : je ne sais pas quoi penser.
Héritage à court terme de la Nouvelle Vague et des manifestations de mai 1968, La Maman et la Putain traite de la vie de débauche sexuelle d'Alexandre, qui peut être perçu comme un reflet de son époque, et la jeunesse des années 70.
Le réalisateur, Jean Eustache, prend des décisions de mises en scène pour le moins singulières. Pour commencer, le film prend son temps : il dure 3h30, et le temps est long (plans-séquence en plan fixe, longs discours). De nombreuses récurrences nous plongent dans une espèce de temps suspendu, figé, qui ne s’écoulerait pas : les personnages sont soit dans un lit, soit au restaurant, toujours en train de fumer, boire du whisky ou téléphoner. Certains mouvements de caméras sont aussi récurrents, comme les moments où la caméra laisse les personnages sortir du champ, comme si elle les laissait libres de choix et de pensée.
Mais au-delà de tout cela, un des éléments les plus perturbants lors du premier visionnage de ce film est le jeu à première vue maladroit des acteurs, et notamment de Jean-Pierre Léaud, qui paraît absolument faux dans chacune de ses paroles. A ce sujet, la critique de Obstiné m'a poussé à réfléchir :
On ne voit plus les personnages vivre, mais leurs intentions réelles.
Obstiné
On aurait donc l'impression de voir des personnages extrêmement faux, sauf qu'en réalité ils incarneraient plutôt ce qu'ils pensent au fond, ce qu'ils pensent vraiment. Et le plus déroutant, c'est qu'on n'arrive pas à comprendre les personnages, leurs réactions nous paraissent saugrenues, absurdes, souvent anti-conventionnelles.
Elle faisait toujours un numéro extraordinaire - qu'elle jouait faux d'ailleurs - mais en fin de compte, plus on paraît faux comme ça, plus on va loin : le faux, c'est l'au-delà.
Jean-Pierre Léaud
Dans ce cas, c'est un coup de génie ! Mais dans les faits, c'est très perturbant, et sans cette approche on a juste l'impression d'avoir affaire à des hippies libertins envers qui on a du mal à éprouver de l'affection.
Pour aller dans le sens de l'authenticité, la seule musique que l'on entend est celle qui est également perçue par les protagonistes à travers le lecteur vinyle, ce qui donne l'impression d'une espèce de vérité de situation.
On retrouve dans La Maman et la Putain des réactions inappropriées, et de nombreuses répliques complètement déjantées et inattendues, que Jean-Pierre Léaud qualifie lui-même au sein du film des "mots d'auteurs". Le film vaut la peine d'être vu, au moins pour noter quelques-unes des perles que l'on peut trouver.
Nonobstant son côté subversif unique et très intelligent, je ressors mitigé de La Maman et la Putain, de par sa longueur, la banalité des anecdotes, les incompréhensions que suscitent les personnages et leurs réactions. Je pense qu'un second visionnage s'imposera, et je pense que le film a besoin d'une lecture en connaissance de cause afin d'être appréhendé correctement.