Dépité, ai-je été. La Forme de l’eau présente les mêmes faiblesses que Crimson Peak, un scénario prévisible, des personnages stéréotypés, une absence d’enjeux, des acteurs lymphatiques, le tout mal compensé par une débauche de créativité sur les décors, les costumes, les effets spéciaux et un fascinant travail sur la lumière, les couleurs et les matières.


Autant j’avais apprécié le dépaysement du séjour en Angleterre victorienne, autant la plongée dans l’Amérique blanche et paranoïaque de la Guerre froide à la découverte d’un homme poisson s’avère décevante. Adoré par une tribu amazonienne, ce dernier s’oppose à l’exploitation d’une nappe de pétrole, est capturé par l’armée américaine et trainé dans un laboratoire.


Sally Hawkins est une femme de ménage muette, orpheline et célibataire qui cache une passion pour l’eau et les œufs durs et travaille pour l’armée. Sally rencontre l’amphibien. Le scénario insiste maladroitement sur l’enjeu militaire. Le captif refuse de coopérer. Le crétin de général 5 étoiles ricain et les Pieds nickelés du KGB s’accordent sur son manque d’intérêt et sur la nécessité de le tuer... Si on écarte le thriller géopolitique, il demeure une romance transgenre. Un remake aqueux de La Belle et la Bête. La Belle aime la Bête qui hésite à aimer la Belle. Sans difficulté, à l’aide un bac à linge sale et d’un fourgon de livraison, la Belle exfiltre la Bête, qui trouve refuge dans sa baignoire dans l’attente des grandes marées. Il semblait plus simple de la conduire directement dans l’Atlantique toute proche.


Les seconds rôles ne brillent guère par leur subtilité. Très méchants ou très gentils. Le seul à sortir du lot, c’est l’excellent Michael Shannon, le féroce Strickland. Le seul à s’être amusé. Il est tour à tour raciste, machiste, sadique, méprisant... Adepte de la pensée positive, il coche toutes les cases de la malfaisance gratuite, mais, au moins, il vit. Il s’emporte, réfléchit, torture, court, tue, souffre, prend des risques, s’offre une belle voiture, drague la bonne...


Guillermo Del Toro nous égare dans les méandres de son histoire, c’est trop long, trop beau, trop vert, trop liquide. Le Bête semblait à l’agonie quand, soudain, elle reprend des forces et se mue en demi-dieu. Il m’a définitivement perdu mais hérite de quatre oscars.

Step de Boisse

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