Rope est avant tout un film basé sur le principe philosophique du surhomme mené au bout de sa logique : « The few are those men of such intellectual and cultural superiority that they’re above the traditional moral concepts. Good and evil, right and wrong were invented for the ordinary, average man, the inferior man because he needs them. (…) I’d hang them first for being stupid. I’d hang all incompetents and fools anyway ».
Fort de ce principe, Brandon, un jeune homme qui se place dans la catégorie des surhommes, tue avec l’aide de Phillip, bien moins assuré que lui, David un de leur camarade d’étude, jugé inférieur. Il orchestre ensuite son « meurtre parfait » pour en faire une œuvre accomplie. Invitant la famille de David et sa fiancée, Janet. Invitant également Rupert, l’un de ses professeurs, avec qui il a parlé de ces théories du surhomme. Et c’est ainsi qu’il les fait tous manger dans la pièce même où repose le corps de David.


Rope se déroule dans cette seule et unique pièce du meurtre et nous présente une palette de personnalités. Ce dîner rassemble des « êtres supérieurs » et des gens tout ce qu’il y a de plus ordinaires et que Brandon méprise. Mais il s’avère que ces êtres « inférieurs » ont plus de qualités que Brandon ne veut en voir… Lui-même apparaît, à nos yeux, comme un pauvre garçon, imbu de sa personne, ivre de lui-même, assoiffé de reconnaissance et manipulateur. C’est ce besoin éperdu de reconnaissance qui le conduit à conduire son professeur à découvrir le meurtre, pour en être admiré.


Le film a la réputation d’avoir été tourné en donnant l’illusion d’un seul plan séquence. La technique de l’époque ne permettait pas une telle prouesse. Il contient donc 11 plans dont les raccords sont camouflés. Cela reste une prouesse puisque un film de cette durée comporte entre 400 et 600 plans. Il résulte de ce procédé le sentiment de se trouver emprisonné dans ce huis clos, sans pouvoir en sortir. Rope fait de nous les témoins effrayés de l’orchestration du crime accompli. Effrayés par cette mentalité qui conduit des hommes à en tuer d’autres à l’échelle individuelle ou à l’échelle mondiale.


Seul bémol à ce film : je trouve le jeu d’acteur de Farley Granger (Phillip) très moyen. Les autres acteurs sont plutôt bons pour l’époque. Rope voit James Stewart faire sa première apparition dans un film d’Hitchcock.


Rope est un film intelligent et une réussite technique, un grand film de Hitchcock.

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le 5 nov. 2021

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abscondita

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