Il me semble, moi, que la plus belle poésie est un peu cachotière. Elle surgit au détour d'autre chose, elle se glisse entre les lignes, elle est protéiforme, elle se vêt presque toujours d'apparences trompeuses, camouflée dans un moment joyeux, ou violent, ou décalé, ou étonnant. Mais surtout, surtout, elle est toujours légère, fugace et insaisissable.
Même quand elle s'annonce, elle est toujours un peu à côté de là ou on l'attend. Dans une charogne Beaudelairienne ou dans la réplique d'une comédie légère de Shakespeare, pour prendre des exemples qui parlent à tous, les plus beau moments seront toujours autour de ceux qu'on surveille.
Autant dire que je n'ai rien trouvé de tout ça dans cette "éternité et un jour" d'un Théo Angelopoulos qui ne partageait manifestement pas cette vision des choses, pas plus qu'une majorité de membres du jury du festival de Cannes. Pour une ou deux scènes saisissantes comme celle du poste frontière baigné de brumes d'où s'échappent des corps agrippés aux grillages, un long et laborieux travail où l'on voit le poète, drapé dans toute sa solennité, déclamer les fruits de son génie avec sérieux et pesanteur.
Forcément, il me fallait citer Woody Allen pour conclure, avec son célèbre "l'éternité c'est long, surtout vers la fin".