Reprendre L'enfer représente un exercice extrêmement difficile pour les épaules d'un réalisateur, Chabrol s'en sort à merveille.

Quoi de si difficile ? Le film à l'origine était une idée d'Henri Georges Clouzot, réalisateur qu'on qualifiait souvent et de façon bien trop simpliste à mes yeux d'Hitchcock français. On lui doit surtout de purs chefs d'oeuvres du cinéma. Les diaboliques qui est le plus proche d'un Hitchcock, mais également une superbe adaptation de L'assassin habite au 21 et un Salaire de la peur qui m'aura définitivement marqué étant enfant.
C'était un type qui avait des idées et qui osait, un réalisateur extrêmement moderne pour son époque.

Clouzot était alors dans une très mauvaise passe, un grand moment de dépression. Sa femme Vera, actrice dans beaucoup de ses films, venait de décéder. Au loin il distingue tous des petits jeunes du cinéma français, la nouvelle vague, qui débarquent - et qui sans doute le considèrent comme un sacré génie. Le réalisateur se décide de faire un film sur la jalousie mais d'une esthétique nouvelle, du jamais vu dira Romy Schneider actrice principale (Béart dans le film de Chabrol) et bien d'autres avec elle.
Cette jalousie c'est un peu lui avec Vera.
Je dis un peu car cette jalousie est extrêmement forte devenant une paranoïa dans le film.
Le couple sera la sublime Romy et le brillant Serge Reggiani.

Pour avoir vu quelques images via le documentaire de Serge Bromberg (un homme qui passe sa vie à restaurer des films anciens, juste cause) je ne peux que me dire que l'Enfer de Clouzot semblait être, du moins dans ses prémisses une oeuvre d'une grande modernité, surtout plastique.
Seulement voilà, le destin en décidera autrement, le tournage fut chaotique et il finira simplement sous la mention "Inachevé".

Claude Chabrol, un de ses "petits jeunes" de l'époque de Clouzot se décide donc à reprendre le scénario original en 1994 d'un tournage commencé en 1964, soit trente ans plus tard.
Soit un jeune couple dont le mari achète une auberge avec une femme une très belle femme, la plus belle de la région. Mais Paul (Cluzet) subit de nombreux problèmes : dettes et la concurrence des autres auberges.
Il en donne une oeuvre extrêmement forte. Cette jalousie fonctionne, les acteurs tiennent vraiment la route. Ma déception vient à l'égard d'Emmanuelle Béart qui a du mal à être aussi juste que François Cluzet et même bien moins juste que la majorité des seconds rôles. C'est d'ailleurs à mes yeux le maillon faible de la chaine. M'enfin elle est mignonne est donc suffisamment pour que nous puissions croire à la jalousie de son époux.

Le reste du film je ne peux vous le racontez, il est fort en émotions sans excès, on y croit simplement.
Si je devais vous conseiller un film sur le thème de la jalousie, ce serait celui là.

cinewater
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le 26 déc. 2011

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Ciné Water

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