A l'instar de François Truffaut et Jean-Pierre Léaud avec le cycle Antoine Doinel, le cinéaste Cédric Klapisch et son acteur fétiche Romain Duris entamaient là le parcours aussi bien professionnel, sentimental et existentiel d'un jeune homme un peu paumé dans une Europe moderne et bordélique, le suivant à diverses périodes de son existence à travers trois films (pour le moment), dont "L'auberge espagnole" constitue la première étape.

Revenant à l'aspect générationnel de son cultissime "Péril jeune", Klapisch ausculte cette fois le présent, observe une jeunesse vivant à l'ère de la mondialisation et d'internet, une génération toute aussi perdue que celle de leurs ainés, coincée entre la nécessité de suivre un parcours tout tracé et l'envie de vivre ses rêves.

En parfaite adéquation avec son sujet, Klapisch retrouve l'énergie juvénile et l'aspect délicieusement foutraque de "Chacun cherche son chat", aidé dans son entreprise par un budget plus confortable et surtout par la légèreté de l'outil numérique. D'avantage qu'un récit classique, "L'auberge espagnole" est un kaléidoscope fait d'instantanés et de scénettes, un bouillon de culture frénétique et incroyablement vivant, éclaboussant l'écran d'effets de style et de couleurs chaudes à la limite de la saturation, le tout au son d'une bande originale du tonnerre.

Formellement abouti, le film de Klapisch reste avant tout un parcours initiatique universel, épousant totalement le point de vue de son héros (volontairement) déraciné (impeccable Romain Duris), sorte de premier de la classe promu à un avenir bien sage qui va enfin découvrir le monde et peut-être, trouver sa véritable place. Autour de lui gravitent des seconds rôles attachants et hauts en couleur, incarnés par une troupe criante de vérité, dont on retiendra principalement Kelly Reilly et Cécile de France.

Si l'on pourra reprocher à Klapisch un certain onirisme toc et une fin d'une grandiloquence maladroite, ainsi qu'une sous-intrigue amoureuse nous obligeant à endurer le jeu une fois de plus exécrable de Judith Godrèche (la pire comédienne du monde ?), il nous offre ici une véritable bouffée d'air frais qui fait un bien fou, aussi drôle que touchante, nous encourageant à prendre à bras le corps notre avenir et tant pis si ce n'est pas celui qui était prévu.

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le 27 avr. 2014

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Gand-Alf

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