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(Revu dans ces circonstances pandémiques)
La force de Terry Gilliam, c'est de savoir mettre en scène comme peu la folie rampante et des environnements chaotiques et poisseux. La force de ce film, c'est aussi des acteurs charismatiques (bien que dans le cabotinage total) et une musique entêtante (tirée d'un thème du grand Pastor Piazzolla).
La faiblesse de ce film (et de Gilliam plus généralement), c'est le scénario et la gestion du rythme : la comparaison avec La Jetée de C. Marker (1962, revue par moi pour l'occasion), dont L'Armée des 12 singes est un remake étendu, est en cela révélateur et instructif. A l'aspect frustre (sous forme d'un roman-photo), efficace et concis de l'original qui ne fait qu'une trentaine de minutes, Terry Gilliam substitue un long-métrage de 2h, boursouflé sur bien des aspects (constamment dans le trop-plein, désagréablement bourratif), multipliant les errances narratives d'un intérêt parfois discutable ; surtout, en choisissant de remplacer la catastrophe nucléaire de l'original par une pandémie, le film perd grandement en vraisemblance:
comment un virus, même créé artificiellement et utilisé en tant qu'arme, pourrait-il se maintenir dans l'air ambiant pendant des années sans hôtes à infecter? (bon, après, je suis pas médecin) Plus encore, comment expliquer qu'une société désormais souterraine soit parvenue à maîtriser le voyage dans le temps (!) sans avoir été capable de trouver une parade à un simple virus? Il me semble (bien modestement) que le premier accomplissement est d'un tout autre niveau scientifique que le second! Je conseillerais dès lors aux scientifiques de cette dystopie de mieux allouer leurs crédits de recherche! lol
Par ailleurs, alors que l'original (en ancrant (bien plus) explicitement la capacité à voyager dans le temps aux souvenirs forts du voyageur - je ne spoile pas davantage, allez voir tout de suite ce chef-d’œuvre!) évitait de mon point de vue très efficacement et très intelligemment beaucoup des paradoxes et erreurs de scénario un peu idiotes et fondamentales qui naissent habituellement de ces récits basés sur des voyages dans le temps, le remake de Gilliam se révèle beaucoup plus faible sur ce point, à défaut de bien reprendre les subtilités de la proposition originale. A cet égard, la fin iconique du récit de Marker, reprise telle quelle par Gilliam, arrive chez ce dernier un peu comme un cheveux sur la soupe, car beaucoup moins bien amenée...
Enfin, de façon plus subjective, je suis plus happé par le ton contemplatif et poétique de l'original que par la relecture beaucoup plus "énervée" et foutraque (mais aussi beaucoup plus drôlatique) de Gilliam, sachant que le thème de la folie, omniprésent dans la version de ce dernier, était quasiment absent dans la proposition initiale de Marker.
Pour conclure ce texte, qui s'est transformé, en s'écrivant, en analyse comparative entre l'original et de son remake : L'Armée des 12 singes demeure un film incontestablement sympa et distrayant, avec un gros travail sur l'ambiance chaotique et perchée, ainsi que du fait d'un cast clinquant (Brad Pitt et Bruce Willis tout de même) ; la proposition de Gilliam est aussi évidemment bien plus "grand public" que le court-métrage de Marker, qui relève d'un cinéma "art & essais" bien plus expérimental.
Peut-être le plus grand mérite de ce film sera-t-il d'amener, comme ce fut un peu mon cas, ses spectateurs vers La Jetée de Marker, à mes yeux plus indispensable et accompli (vous l'aurez compris j'imagine en lisant cette critique).
Créée
le 13 avr. 2020
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