Krampus nourrissait quelques espoirs au vue d’une bande annonce plutôt prometteuse, rappelant les heures radieuses d’une décennie 80s plus que jamais à la mode pour faire ressurgir notre nostalgie enfantine, une petite madeleine toujours savoureuse à déguster de temps à autre. Michael Dougherty réalisateur du remarqué Trick’r Treat (2009) adapte le mythe de cette créature, sorte de père fouettard cornu et monstrueux aspirant les sentiments mornes et désabusés des enfants au moment de Noël pour venir prendre leurs biens les plus précieux, tandis que Saint Nicolas offre aux plus croyants.


Le jeune Max se retrouve lors du réveillon du 25 décembre au milieu d’une famille qui ne se supporte que péniblement, il déteste ses cousins, ses parents sont en froid et sa sœur devenue adolescente n’est plus aussi proche de lui qu’auparavant, il rédige alors ses vœux pour désespérément rallumer la flamme évoquant tout le côté fraternel de cette fête et enfin vivre dans la quiétude qu'il souhaite. Mais suite à la dispute de trop il perd espoir, déchire sa lettre et laisse échapper les miettes dans le ciel de cette nuit sombre et glaciale, loin de s’imaginer des conséquences de cet acte …


Dougherty a pour ambition d’offrir un conte horrifique de Noël un brin décalé, l’intro joue même du second degré pour mettre en valeur le côté consumériste de l’événement, la course aux jouets, l’abondance, la désacralisation, toute cette irritation explose dans un long slow-motion surréaliste, le ton est donné. Mais c’est bien dans la grande maison familiale que l’action de cette histoire va se dérouler, le personnage de Max reste évidemment le point central, il subit le climat ambiant, la mère (interprétée par l’excellente Toni Collette) est également mise en avant dans la première partie comme hôte dépassée par ce tourbillon incontrôlable, le diner part en cacahuète entre les cousins odieux et l’oncle beauf adepte des armes à feu, l’atmosphère est stressante voire haïssable, comme intimement invité pour le banquet du clan Dursley. En tant que spectateur on ressent bien le malaise même si je trouve personnellement la mise en scène assez faible, pour ne pas dire puérile, à l’image d’une écriture redoublant de clichés comme la grand-mère germanique semblant au fait d’un mystère troublant, l’illustre ancêtre européen d’un temps perdu, et ça ne loupe pas.


Le ton fantastique est d’ailleurs bizarrement amené, pourtant le cadre propose d’excellentes choses, la séquence où la sœur de Max s’enfonce dans le décor enneigé pour tomber nez à nez avec la créature est filmée d’une manière très intéressante, mais j’ai trouvé ça tout de même un peu trop frontal, le film grille les étapes. J’aurais préféré en savoir plus sur la légende pour ensuite y être sensiblement confronté, celui qui n’a pas pris connaissance de la bande annonce et du folklore risque de sérieusement tomber des nues, elle y est certes narrée plus tard par une animation (plutôt sympathique et réussie d’ailleurs), mais à mes yeux en retard par rapport au cheminement de l’intrigue. Le point positif étant la nuance étonnamment mince entre conte familial et pur film d’horreur, un clivage assez inédit de nos jours où il faut à tout prix trancher pour la classification, ce film a clairement le cul entre deux chaises et assume de bout en bout, c’est à saluer.


La seconde moitié du long métrage, axée survival, rend en partie hommage aux films de monstres à échelle réduite des années 80 tels Gremlins, Critters ou Puppet Master, donnant lieu à une séquence pour le coup mémorable par sa folie, difficile à ce moment précis de ne pas prendre du plaisir. L’esthétisme référencé ainsi que le rythme répondent présent, les FX alternent maquettes à l’ancienne et CGI pour un contraste un tantinet déplaisant, disons que ça passe, on ne peut malheureusement plus rien n’y faire désormais. Ce qui est cependant plus difficile à avaler c’est la symbolique du Krampus mise en relation avec le format, Dougherty semble complètement dépassé et préfère aspirer un à un ses enjeux pour arriver à son point culminant, s’instaure un sentiment d'inconfort, un "Hey Asshole !" de la bouche du gosse pour apostropher le monstre qui sonne clairement de trop, les motivations de ce dernier ne sont d’ailleurs pas très claires au final… Par contre l’ultime acte est très réussi et permet au conte d’aboutir sur une bonne note.


Krampus est donc une semi déception, l’atmosphère, les références et les tonalités fonctionnent admirablement contrairement à divers points de scénario, la mise en scène et également le jeu parfois approximatif des acteurs (j’insiste pour sauver Toni Collette), je pense que de manière générale le public pourra répondre positivement à l’ambition du film, qui véhicule de bonnes valeurs et sait jouer des contre-pieds, cependant le mythe de cette créature peut se révéler excluant par rapport à une certaine familiarité qu’établit le réalisateur.
Un petit film à garder au chaud pour les fêtes de Noël.

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le 22 mars 2016

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JimBo Lebowski

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