Cher Batman,
Comme tu le sais, je t’aime beaucoup, et j’attendais particulièrement ce film, pour te voir, toi, et ta clique DC comics : j’espérais y voir un film de super-héros mémorable.
Tout avait si bien commencé, j’y ai d’abord fébrilement cru : Justice league serait-il un film différent, qui assume sa dimension épique ?
Déjà, le format inhabituel, 1:,85 (je crois), plus serré que le scope de coutume, ainsi que le grain de la pellicule, m’ont donné de l’espoir : ce format moins propice au spectaculaire, plus intime, pouvait permettre d’offrir un cadre sensible à cette fameuse Justice League, de partager les sentiments, les émotions de ses membres.
Quelques beaux plans reprenant l’imagerie comics m’ont laissé présagé le meilleur, et un retour vivifiant aux sources : toi, Batman, lors de ta première apparition, avec les lumières de Gotham en arrière-plan ; ou l’arrivée des terroristes du début filmée sous des angles étonnants, très comics.
Mais surtout, le film se prend au sérieux, n’est pas dans la désacralisation permanente marvellienne, qui a longue finit par agacer. Le film se veut épique, veut créer des images iconiques, sans toutefois oublier l’humour, circonscrit à un seul super-héros, ton collègue Flash (le potentiel comique d’Erza Miller m’a d’ailleurs étonné).
Mais non : les aventures de toi et tes amis m’ont laissé indifférents. A aucun moment vos péripéties ne m’ont intéressées, touchées, fait trembler.
Je le sais, c’est terrible, c’est cruel : susciter l’indifférence est ce qu’il y a de pire pour un film à l’ambition épique. Il y a certes les défauts habituels des films de super-héros (un montage beaucoup trop cut-cut-cut dans les scènes d’action, qui rend les images illisibles, surtout lorsqu’elles sont sombres) ; il y a certes les défauts des films d’équipe de super-héros (les super-héros sortent de nulle part et n’ont pas le temps d’être bien caractérisés = on ne s’attache pas à eux = leurs tribulations n’intéressent qu’eux), mais il y a d’autres choses. D’autres que moi feront cruellement la liste de ce qui ne fonctionne pas dans le film, mais en vrac : les effets numériques parfois moches, un « super méchant » et ses trois « boîtes » pas bien menaçants, une succession de séquences disparates, un film confus sans unité.
Et même toi, Batman, tu ne sers à rien dans ce film, tu n’y apparais que comme une caution « icône de la pop-culture ».
Ce que les gens aiment chez toi, ce sont certes tes costumes et tes gadgets (très présents dans le film), mais c’est d’abord la complexité de ta personnalité et de ton humanité (très absents du film).
Alors, oui, Gal Gadot est divinement belle, mais cela ne suffit pas pour faire un bon film.
En espérant de tout cœur que le goût pour l’épique de ton écurie finisse par vaincre le penchant excessivement désacralisateur de Marvel,
Tom.