« What are your superpowers again ? I'm rich »

Hier arrivait sur les écrans du monde le dernier né du fameux « DC Universe ». Le matin même, alors que je réservais ma place, celle-là même qui est désormais numérotée et qui me laisse nostalgique de l’époque où il y avait encore un petit suspens quand à savoir où on serait assis dans la salle, je me demandais à quoi m’attendre. D’abord craintif au vu des différents trailers et par la direction semblant être prise pour la franchise, j’avais fini par me laisser convaincre ces dernières semaines que le film pourrait être une réussite. Je me surprenais même à attendre avec une impatience certaine le jour de son arrivée (niveau 5 d'attente sur une échelle de 6 dans mon fameux tableur Excel de classement de films, c’est dire !). Je me suis donc précipité le soir même de sa sortie sur un fauteuil rouge, armé d’un popcorn, d’une boisson fraiche et d’un esprit conquérant, prêt à me laisser embarquer par Batou et ses copains. 


Et puis, ça a commencé. Et puis j’ai déchanté. Très vite. Trop vite. Et trop longtemps. Je vais être clair; je n'ai pas du tout aimé ce film. Et je vais tenter d'expliquer pourquoi. 


Si je laisse de côté la scène pré-générique, dont l’intérêt scénaristique n’a d’égal que la gêne qu’elle a provoquée chez moi, les 15 premières minutes ont suffi à doucher mes espoirs. Elles concentrent à elles seules tous les problèmes que le film va traîner pendant un peu plus de 2 heures. Que ce soit le ton général du film, avec un mélange d’humour (qui tombe quasiment toujours à côté) et de pseudo mélodrames, la réalisation totalement noyée par des effets spéciaux vus et revus et qui n’ont plus de spéciaux que le titre, une direction artistique complètement impersonnelle et qui fonctionnerait pour tous les films du genre, et surtout un rythme beaucoup trop « mécanique » qui s’impose au scénario, tout ou presque est manqué. L'ensemble offrant un rendu cyclique qui manque franchement de panache et qui laisse le scénario de côté, loin d’en faire le fil conducteur. Pourtant, comme Bruce Wayne, Warner avait mis les grands moyens pour sa réalisation et la déception n’en est que plus grande. Le bon usage des ressources prime toujours sur la quantité dont on dispose. En voilà encore un bel exemple. Alors oui, il est bon de préciser que cet opus à connu une production chaotique* et qu’il faut en tenir compte dans la critique que l’on en fait. Mais par-delà ce Justice League, c’est surtout la direction prise par la production pour la franchise, sur cet opus et les suivants, qui me déplaît fortement. A trop vouloir se dégager du côté « sombre », reproché à Batman V Superman, et à chercher éperdument à se singulariser de la concurrence Marvel, ils finissent par s’y perdre.


Dans les faits, ce film est en réalité une espèce de spectacle visuel de 2 heures, dont l’ensemble laisse penser parfois à une simple succession des scènes de combats numériques entrecoupées de dialogues et de plans « badass » pour donner aux acteurs une raison d’être. Mais le pire n'est pas tant l'orientation choisie, mais simplement que ça n’est pas bien fait. Les scènes d’action par exemple. Pour plus de 80% d’entre elles, elles sont numériques, laissant arbitrairement de côté les lois de la physique et offrant parfois des rendus visuels très étranges. Que ce soit la cape de Batman qui semble ne pas subir les effets de la gravitation quand il se bat, les animations des chutes qui laissent perplexe ou encore les costumes qui ne s’abîment jamais, tout sonne faux. Evidemment il faut parler de la présence des ralentis, qui se comptent en dizaine. S’ils sont, reconnaissons-le, une marque de fabrique de Snyder, l’abus qui est en fait fini par écœurer et même casser le rythme de certains combats. Pour le reste, entre les moments presque gênants, nourris par des dialogues à la ramasse et les moments où l'on se demande comment on est passé de la scène précédente à celle-ci, il y a de quoi pester. C’est franchement décevant et ça laisse trop souvent circonspect.


Pourtant, on ne peut pas reprocher aux acteurs d’être mauvais, que l’on s’entende bien. Et je dirais même que certains sont très bon, à commencer par Gal Gadot qui finit de devenir l’incarnation parfaite de Wonder Woman. De son côté Ezra Miller, qui reprend le rôle de Flash, apporte la touche qui lui manquait dans la série du même nom. Il en fait un personnage plutôt attachant, bien que parfois agaçant de par son humour trop présent à mon goût. Mention spéciale à son jeu de jambes quand il court au ralenti (assez drôle pour l’homme le plus rapide du monde) dont l’animation est tout bonnement ridicule. Les autres nouveaux de la bande font plutôt bien le job, même si globalement trop marqués chacun par un traits de caractère précis, souvent stéréotypé voir cliché. Ben Affleck de son côté tombe lui aussi un peu dans la caricature et semble parfois montrer quelques signes d’ennui et de manque d’intérêt dans son jeu. Pas étonnant quand on sait qu’il a longtemps hésité à reprendre la cape et qu’il est probable qu’on ne l’y revoit plus jamais. Dommage, il avait fait ses preuves l'an dernier. Mais le problème du film ne vient pas des personnage en eux même, mais de ce que l'on en fait. On a la sensation qu’ils sont tous cantonné dans un rôle très précis, et que la seule vocation de leurs échanges est de créer un « décalage », qui doit trancher entre répliques dramatiques et pointe d’humour, trop souvent mal dosée. Sur le papier, pourquoi pas, mais dans les faits, ça tombe complètement à plat et ça décrédibilise pas mal de moments qui se voudraient « forts ». Notons que l’on a évidemment droit à la bonne vielle scène de romance, qui est tout aussi pertinente et bien jouée que celle de Loïs et Clark dans Batman V Superman au moment du combat final. Là-dessus aussi, on n’est pas déçu. Le film se loupe donc à mes yeux vraiment à tous les étages, et j'ai peine à trouver des choses qui le fasse sortir de l'ombre dans lequel il aurait dû rester.


Seule petite étincelle de lumière, certains passages de la bande originale. Orchestrée par Danny Elfman, le papa du plus célèbre des thèmes Batman, celui des films de Tim Burton, et auquel il ne manque pas de faire quelques clins d’œil. Une approche un peu différente de ce que Zimmer avait pu faire et qui sonne souvent juste. Mais là encore, tout n'est pas parfait et certains passages manquent encore d'identité et se noient dans les bruits d'explosions et autres moteurs de Batmobile.


Enfin, à tout cela s’ajoute un point, dont j’assume la pleine responsabilité. J’ai vu ce film en VF. J’en suis un grand défenseur, contre vents et marées parfois, soutenant toujours que la France à en son sein de très grands doubleurs. De Patrick Bethune, qui nous a quitté il y a quelques jours, à Richard Darbois, en passant par Patrick Poivey, on ne manque pas de talents dans le secteur. Mais là, ça n’est juste pas possible. Clairement, je considère le doublage comme tout bonnement catastrophique. Il finit d’achever le film, et enterre un peu plus manque d’inspiration de certaines répliques. Même la synchronisation laisse parfois à désirer et offre un un rendu vraiment très très très en deçà des standards habituels du genre, que beaucoup considèrent déjà trop bas. Je retournerais donc voir la bête en VO, pour me faire une idée plus précise et peut-être arriverais-je à en sauver quelques éléments.


Vous l'aurez donc compris, ce film est à mon goût très décevant. Alors oui, je suis peut-être très sévère, et d’aucun me diront (comme mes partenaires de séance me l'ont même déjà dit) que j’en fais trop. Mais je suis profondément déçu. Déçu de ce qu’est ce film, de ce qu’il veut être, de là où il veut aller et de ce à quoi il nous prépare. J’attends donc aujourd'hui une hypothétique version longue, celle là même qui m'avait fait changé d'avis sur le précédent opus, pour revoir mon jugement. Mais surtout j'attends des jours meilleurs pour Batman et ses collègues dans les années qui viennent. Cependant, plus grande encore est devenue ma crainte, en sortant de la salle hier, quand à voir à l'avenir un film Batman à la hauteur de mes attentes. La dernière lueur d’espoirs dans ce brouillard qui se dessine reste la deuxième scène post crédit, qui nous donne de quoi espérer. Encore. Un peu. Un tout petit peu.


*Le réalisateur, Zack Snyder, a dû quitter le tournage avant la fin, en raison du suicide de sa fille de 20 ans. Le film a été confié aux ordres de Joss Whedon, impliquant de nouveaux rushs, des reprises de certaines scènes  et certains changements de dernière minute. Ajoutez à cela un charcutage de la director’s cut, imposé par Warner qui ne voulait pas dépasser les 2 heures.

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le 16 nov. 2017

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