Avant d’être une saga avec ses hauts et ses bas, Jurassic Park fut un film qui connut un formidable succès dans le monde entier, battant le record au box-office mondial en 1993 et restant au sein de la culture populaire l’une des références cinématographiques des trente dernières années. Bon avant cela c’était aussi un livre mais là n’est pas le sujet. Réalisé dans la période faste du tonton Spielberg, Jurassic Park n’est pas seulement un film culte, il est aussi un film dont on devrait s’inspirer aujourd’hui. Refusant le surplus d’effets spéciaux, des maquettes ont été utilisées durant le tournage, rendant le film quasi-intemporel. Les deux premiers Jurassic Park restent les deux films de la saga les plus réalistes et les mieux réalisés, en partie grâce à ce choix (et aussi grâce à Spielberg, il faut bien rendre à César ce qui est à César). Faisant partie de mes films favoris, ce film est à la fois adapté aux plus jeunes et aux adultes, un choix rendant la concrétisation du projet difficile tant le film réussit à nous effrayer, à tous les âges. Ayant parlé d’influence sur le temps, je vais dorénavant me pencher sur certains éléments dont bon nombre de personnes travaillant dans le cinéma actuel pourraient s’inspirer.


Fondamentalement, ce film se distingue de ses camarades par rapport aux personnages et à leur écriture. Non seulement ils sont plus intéressants que dans les autres volets, mais en outre ils sont infiniment plus charismatiques et mieux écrits. Ian Malcolm est un de mes personnages préférés toute fiction confondue, envoyant par salves des répliques cultes toutes les minutes. Le fameux John j’ai dépensé sans compter Hammond est un excellent personnage, tout comme Alan Grant ou Robert Muldoon, le garde-chasse du parc. En plus d’avoir une personnalité qui déteint sur le reste du groupe, ces personnages sont attachants et irrésistibles. Cela présuppose généralement une finesse dans les dialogues, que l’on retrouve ici. Sans revenir sur les répliques inoubliables de Malcolm, les autres personnages s’en sortent admirablement bien. Pour ne citer que cet exemple, la relation entre Alan et les enfants est à la fois hilarante et touchante, à défaut d’être originale.


Faisant partie des meilleurs compositeurs du cinéma (si ce n’est le meilleur), John Williams réussit toujours à se diversifier en gardant une mélodie particulièrement travaillée et recherchée. En l’occurrence, il a su composer une bande originale parfaitement adaptée puisqu'elle réunit des musiques qui se marient bien à l’aventure, la découverte épique des dinosaures, d’autres avec le suspense et un rythme accru. Outre la magnifique bande originale du film, le film maîtrise très bien tous les éléments sonores. Le bruit de pas du tyrannosaure dans le verre d’eau, mythique à souhait, les vélociraptors qui se déplacent dans la cuisine et qui jouent avec les ustensiles, les cris des dinosaures : tout cela est réalisé avec brio. Ce sont des petits détails qui peuvent passer à côté dans certaines productions actuelles mais ils font bien partie de la petite cerise sur le gâteau, qui le rend au final si bon. Ils peuvent changer notre regard sur un film, et je me réjouis de voir que ce film a su prendre le sujet par le bon bout et nous proposer quelque chose qui va au fin fond des choses, s’intéressant aux moindres détails.


Le travail d’ambiance dans un film est d’une importance cruciale. C’est une étape que négligent beaucoup de films d’horreur, faisant passer certains films à suspense bien plus effrayants que leur propre contenu. Il doit être cohérent dans le monde dans lequel il se situe, nous donner le sentiment qu’il existe réellement et si possible nous procurer des émotions, soit de répulsion, soit d’attraction. Or ici l’univers m’a toujours fait rêver. Je ne souhaiterai peut-être pas me retrouver au-milieu de certains de ces dinosaures affamés mais je trouve cet univers incroyablement attirant. Pour le comparer à un film du même thème, c’est une étape où échoue totalement Jurassic World. J’ai trouvé l’univers sans saveur, totalement plat et il ne me donne aucune envie de suivre le reste de la saga alors que les autres avaient réussi à mon sens à garder un tant soit peu de grandeur/magnificence dans l’ambiance. Il faut dire que l’usage à outrance de CGI est un facteur non négligeable d’échec. Dans Jurassic Park, c’est incroyablement fin et épuré : pas de CGI sauf pour les scènes de courses-poursuite ou de mouvements intenses, et encore je trouve les dinosaures vraiment réussis. Le film date de plus de vingt ans mais les effets spéciaux sont sidérants de réalisme.


A défaut de nous offrir des scénarios complexes et alambiqués, Spielberg sait nous proposer quelque chose de diaboliquement efficace, qui sait aller à l’essentiel. Dans la maîtrise du rythme, des enjeux et de la tension, on trouvera difficilement plus abouti que ce film dans la filmographie de Spielberg. La gestion des Raptors est parfaite, ils sont dans l’introduction du film et dans sa conclusion, jouant le rôle de trouble-fêtes dans ce charmant week-end, volant presque la vedette au Tyrannosaure. A l’instar de Dunkerque ou de Duel pour reprendre un film de sa filmographie, l’ennemi est peu ou prou montré pendant une grande partie du film, en décuplant notre angoisse. On ne voit réellement les Raptors que dans le dernier quart du film. Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort, et ce que l’on ne voit pas nous effraie davantage. Une règle simple mais efficace qui est régulièrement respectée chez Steven.


En ces temps où les sagas ne font que perdre en intérêt ou qui se font annihiler par des producteurs un peu trop avides de billets verts, que c’est plaisant de revenir aux sources. Aux sources mêmes des sagas que l’on voit se poursuivre, qui nous rappellent comment réussir un très bon long-métrage avec moins de moyens. C’est l’exemple même de Jurassic Park qui traverse les âges alors que je ne donne pas cher de la peau du dernier en date, Jurassic World.


On pourrait débattre indéfiniment sur la logique de faire de ce film une saga, mais je pense que ce n’est même pas réellement le sujet. Le film est une immense réussite en tant qu’œuvre et on comprend facilement qu’il se suffit à lui-même, il n’est ni une introduction ni une conclusion. Mais faîtes-moi penser à remercier Spielberg pour ce formidable film.

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le 10 août 2017

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MatthieuS

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