Jules et Jim par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Jules est allemand et Jim est français. Ces deux copains inséparables malgré leurs caractères et leurs façons différentes de voir la vie vivent chichement leur passion d'artistes dans le Paris de 1900. Ils tombent sur la photo d'une statue prise en Grèce représentant un visage de femme dont le sourire les éblouit . Tous deux partent aussitôt découvrir ce fameux buste. C'est alors qu'à leur retour ce duo fait la connaissance de Catherine, une jeune femme émancipée au caractère affirmé dont le sourire est semblable à celui de la statue. Aussitôt Catherine tombe amoureuse de Jules et l'épouse.
C'est alors que la première guerre mondiale intervient. Rescapés de cette terrible épreuve, Jim et le couple se retrouvent, un couple qui malgré l'arrivée d'une petite fille se déchire pour un oui ou pour un non. Catherine devient indépendante, agressive malgré le flegme et la tolérance de son époux. Les trois amis de nouveau réunis, La jeune femme se prend à aimer Jim de qui elle désire un enfant et décide par la même occasion de quitter Jules. Malgré cette épreuve, les deux copains resteront unis dans l'adversité face aux caprices et aux manigances de Catherine. Celle -ci désespérée et affectée par le fait de ne pouvoir enfanter de Jim se met à jouer un terrible jeu aux conséquences qui se révéleront tragiques.


Croquer la vie et réinventer l'amour, tels étaient les idéaux de Catherine, une femme hypersensible sous ses allures modernistes et dérangeantes pour son époque. Face à elle, deux garçons artistes, un peu bohèmes s'enflammant pour cette créature leur tombant dans les bras. Ils sont "hypnotisés" par cette femme qu'ils idéalisent eux aussi.
C'est alors qu'après l'insouciance vient le drame: la séparation que provoque la guerre, une guerre de quatre ans dans laquelle Jules et Jim se retrouveront "opposés". A chaque attaque, chaque fusillade, il ne pourront ôter de leur tête la peur de tuer l'autre.
Catherine elle aussi va passer de l'insouciance aux devoirs du mariage, mais le côté conventionnel de cette union et de cette vie la mine malgré l'arrivée de la petite Sabine, leur petite fille. Elle ne supporte plus Jules lequel est résigné et toujours amoureux. C'est au milieu de ce dilemme que Jim revient après cette sale guerre rendre visite à ses amis. Il délaisse alors Paris et sa vie de couple, ne pouvant se défaire de l'emprise de Catherine.


Déçue par l'amour qu'elle s'était jurée de réinventer, celle-ci décide de vivre avec le nouvel arrivant mais l'ennui et l'angoisse du futur continuent de la hanter d'autant qu'elle ne parvient pas à accéder à son rêve: avoir un enfant avec Jim. Elle admet que sa raison de vivre ne pourra se réaliser et par là même l'amitié inébranlable de Jules et Jim deviendra alors indécente et blessante pour elle. Désormais, sa seule ambition restera celle de venger son existence au prix d'une dernière et machiavélique machination.


Voici le cinquième film de François Truffaut dans lequel il adapte avec un talent fou le roman d'Henri-Henri-Pierre Roché. Il profite de ce sujet sensible pour aborder les thèmes de l'amitié au delà des épreuves les plus dures de la vie et de l'émancipation de la femme au travers de son héroïne qui enfin choisit elle-même sa quête amoureuse dans "le tourbillon de la vie". Ce n'est surtout pas l'apologie du ménage à trois qui nous est proposée mais au contraire les conséquences fâcheuses de l'indécision relative à un idéal féminin jamais atteint. Cette histoire qui se veut au départ optimiste tombe doucement dans la gravité puis dans le drame.
Le propos est dur, pessimiste mais réaliste. Catherine laisse parler son cœur mais celui-ci ne peut la guider. Jeanne Moreau est époustouflante en passant de la femme croquant la vie à pleines dents à la femme insatisfaite puis désespérée prête à tout pour se venger de l'existence. Oskar Werner dans le rôle de Jules et Henri Serre dans celui de Jim sont émouvants à souhait dans leurs personnages de "gamins" inséparables malgré les épreuves que leur font subir la guerre et leur égérie idéaliste. Encore un mot sur l'interprétation "historique" de Jeanne Moreau dans "Le Tourbillon", l'inoubliable ritournelle composée par Georges Delerue.


François Truffaut avait bien du talent pour nous abreuver de tels chef-d'œuvres. Il n'en était qu'à son cinquième film avec "Jules et Jim" et déjà son palmarès s'illustrait des "Quatre-cents coups" ou de "Tirez sur le pianiste" entre autres. De sa trop courte carrière, il nous livrera par la suite beaucoup d'autres "Incontournables" tels que celui dont je viens de vous entretenir.

Créée

le 5 juin 2014

Modifiée

le 31 mars 2013

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