En analysant le film, je pense que j'analyse en grande partie aussi le livre.


La légende raconte qu'un jour Dalton Trumbo a passé son bac de philo option pognage et qu'il avait fait l'impasse sur tout un chapitre : celui de la guerre. Le sujet tombe :



La guerre : c'est bien ou c'est pas bien ?



Il n'avait pas vraiment d'idées, du coup il s'était mis à écrire un truc à moitié naze sur un bléssé de guerre 100% infirme, un truc 100% pathos boiteux, plus préoccupé par la longueur de sa copie plutôt que par le sens qu'il voulait y mettre... Il était tellement perdu qu'il en avait même oublié de faire le plan dialectique le plus basique, rendez vous compte.
A la fin, il a mis son nom et sa filière en haut à droite, il a rajouté un titre, il a relié avec une jolie couverture en cuir et il a rendu ça au surveillant.


Quelques jours après, le prof a reçu les piles de correction. Il prend trois Xanax et il ouvre le carton. Au milieu des feuilles simples, il voit un pavé relié de 63 copies-doubles petits carreaux. Il est intrigué alors il commence par corriger celui-là. Comme font tous les profs de philo, il compte le nombre de lignes, après il sort la balance et il pèse la copie : le poids d'un livre de poche. Sur son barème, pas besoin de regarder le contenu, ça vaut directement la note maximale, 20/20. Pendant les séances d'harmonisation, il doit justifier de la note. Comme il a quand même lu au moins l'introduction, il arrive à deviner plus ou moins la suite et à baragouiner que c'est une sorte de pamphlet humaniste anti-militariste sans égal. Un de ses collègues prof syndiqué gauchiste semble intéressé et lui dit qu'il a un arrière-cousin éditeur et du coup ils distribuent le livre.


Vous connaissez probablement la suite. Donc :


Le problème, c'est que pour nous dire que "la guerre, c'est mal", le film fait preuve d'une subtilité inexistante.
Pour imager, il a une subtilité comparable à celle de ton pote en soirée bourré à 21h30 qui sort des toilettes la braguette ouverte avec du vomi sur les dents parce qu'il a voulu faire le chaud et s'enfiler un mètre de shooters en 10 minutes pour impressionner les deux gonzesses de la table à côté, et qui essaye de continuer à les draguer avec son haleine de frigo en panne pendant ses dernières minutes de lucidité post-gerbe avant de s'endormir sur la table en renversant sa bière. Tu connais ce pote.


On appréciera :



  • La finesse absolue des flashbacks où la caution love du film répète
    23 fois par minute "Ne pars pas, tu vas mourir". (Et au passage, la
    scène de première fois la moins crédible de l'histoire de l'humanité
    ; les pornos "virgin amateur first time" avec une actrice de 35 ans qui a le
    plus beau ticket de métro que tu verras de toute ta vie,
    ultra-flexible qui fait un 105D débordant de silicone et un mec
    bodybuildé, 20 centimètres au repos qui tient 1h30 de pilonnage
    massif et qui réussit du premier coup la position du petit pont sont
    plus crédibles).

  • La finesse incomparable de la scène de la masturbation (Par ailleurs
    pas crédible du tout non plus).

  • La finesse inégalée de l'ensemble des personnages, caricaturés et
    catégorisés comme jamais (à l'exception de Jésus-Christ qui s'avère à
    juste titre le sauveur du film et qui lui évite de peu le 1/10).

  • Plus généralement la finesse sans commune mesure du scénario,
    prévisible à 100%.


Une morale à deux balles avec une question de vie ou de mort (littéralement) pour nous expliquer que "la guerre c'est mal" ; un enfant de 12 ans ferait preuve de plus de discernement. Allez lire Barbusse : c'est à peu près aussi chiant mais ça a le mérite d'aller un peu plus loin.


Pour résumer, une note fine pour un film fin.

DRElmer
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le 4 nov. 2017

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DRElmer

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