Adaptation du récit de Robert E. Burns par Mervyn LeRoy, "Je suis un évadé" nous fait suivre un homme, James Allen, qui va se retrouver en prison malgré lui et il va devoir faire face à plusieurs situations délicates pour espérer retrouver sa liberté.
Mervyn LeRoy braque sa caméra que le personnage de James Allen, sublimé par l'exceptionnelle composition de Paul Muni qui arrive à le rendre attachant et, à retranscrire tous ses dilemmes et ambiguïtés. Il nous fait passer par divers sentiments, allant de l'injustice à l'espoir en passant par la résignation et, à l'image des dialogues, des autres personnages (qui arrivent à exister autour de lui) ou encore du déroulement de l'action, il bénéficie d'une excellente qualité d'écriture.
Bien qu'il mette en place un rythmé élevé, LeRoy arrive à bien développer les personnages ainsi que plusieurs thématiques. Il met James Allen dans la peau du fugitif éternellement traqué et aborde avec dureté plusieurs sujets, à commencer par la condition des prisonniers dans le pays de la liberté, par son système judiciaire ou encore la façon dont il traite ses citoyens, les juge et les modifie. Plusieurs scènes illustrent à merveille cela et sont vraiment mémorables, à l'image de l'effrayant et puissant final ou des gospels chantés par les prisonniers noirs (qui sont majoritaires dans le bagne). D'ailleurs ce sont vraiment les séquences se déroulant en univers carcéral qui sont marquantes et puissantes. LeRoy nous fait ressentir toute l'horreur qui y est présente, sans jamais tomber dans la lourdeur, notamment lors des passages où l'on assiste aux travaux enchaînés des prisonniers. Mais c'est aussi par ses tentatives de devenir un citoyen honnête et les alternances entre les différentes étapes sociales par lequel il passe que "Je suis un évadé" brille.
Visuellement réussi, "Je suis un évadé" bénéficie d'une belle photographie en noir et blanc et d'une reconstitution impeccable, notamment dans le pénitencier. Sans tomber dans la facilité et toujours avec intelligence, LeRoy use de diverses ellipses et le montage est particulièrement réussi donnant une ambiance nerveuse et pressé à l'oeuvre. Il met en place une tension et une intensité de plus en plus forte et surtout il fait ressortir toute l'émotion de la descente aux enfers de James Allen, sachant retranscrire ses sentiments jusqu'à cette brillante et marquante fin...
Tout en dénonçant les dérives du pays de la liberté, Melvin LeRoy orchestre un film coup de poing qui provoque l'effet voulu de bout en bout. Tension, intensité et atmosphère sombre, nerveuse et âpre sont présent tout le long tandis que Paul Muni fait ressortir toute l'émotion et la puissance dramatique de son personnage... Brillant.