Un portrait de femme, de veuve, de mère, de première dame, d'enfant perdue, de rebelle ... Jackie est tout cela dans un film cubiste de Pablo Larrain qui laisse à Jackie Kennedy une large part de mystère, et c'est bien là l'essentiel. Et qu'on ne parle plus de Biopic, ce pseudo-genre (retracer une vie en 90 ou 120 minutes, quelle escroquerie !) que Neruda et Jackie viennent de rendre caducs en deux tours de main. L'atout premier du film ou plutôt le deuxième, après l'interprétation de Natalie Portman, on y reviendra, c'est sa science du découpage, cette alternance de temporalités sur un laps de temps relativement court, de l'assassinat aux funérailles, avec de menues exceptions. Dallas est peu évoqué mais ses conséquences sur l'existence de Jackie forment l'essence du long-métrage. Déconcertante héroïne, au tailleur rose taché de sang, fumeuse en série et trublion d'un protocole qu'elle bouleverse par sa seule volonté. Jackie est froide, Jackie est glamour, Jackie est déboussolée, Jackie est arrogante, Jackie est intelligente et candide. Et Natalie Portman est Jackie, non dans l'imitation mais par une sorte de mimétisme miraculeux. Une performance d'actrice qui ne sent pas la sueur ni l'effort mais la grâce et le talent. Une nouveauté pour Pablo Larrain dont la direction d'acteurs s'était jusqu'alors surtout exercé au masculin, de Tony Manero à Neruda, en passant pas No et El Club. Si Jackie phagocyte l'écran, le formidable Peter Sarsgaard, en Bobby Kennedy (l'un des sous-thèmes les plus intéressants du film que ces relations brumeuses entre Jackie et son beau-frère) et John Hurt en prêtre (un belle façon de tirer sa révérence même s'il a tourné d'autres films après celui-ci) donnent de la densité à leurs "seconds rôles." Au côté de cette icône éternelle autant dans la lumière des projecteurs du monde que dans l'ombre de ses sentiments et des pensées contradictoires dont elle restera la seule dépositaire.

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le 2 févr. 2017

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Cinéphile doux

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