Le film de vengeance est un plat dans lequel les Coréens n'ont plus rien à prouver. Inutile que je parle d'Old Boy, qui trône très fièrement dans mon top 10 de mes films préférés et qui doit être un des tout meilleurs, sinon le meilleur, film de vengeance qui ait été fait. Dans le genre, un certain Kim Jee-Woon a fait deux films jouissant d'une certaine réputation. Et si A Bittersweet Life a pour moi été une grosse déception, un film contenant trop de facilités scénaristiques, trop prévisible, avec un héros trop increvable, J'ai rencontré le diable, lui, par contre, bien que n'étant pas dénué de quelques facilités scénaristique, m'aura totalement scotché à mon siège du début à la fin pour mieux me mettre une grosse claque.
Cependant, A Bittersweet Life avait pour lui le mérite de montrer à quel point Kim Jee-Woon est un réalisateur de qualité, ce que ce dernier nous démontre à nouveau avec J'ai rencontré le diable, en nous livrant un sacré travail au niveau de la mise en scène, en particulier au sein des scènes d'actions, parfois d'anthologie, devant lesquelles on ne peut que se délecter de leur qualité et de leur efficacité.
Malgré ça, les scènes d'actions ne sont en aucun cas plaisantes. Elles sont frontales, crades, glauques, sauvages, sans concession aucune. Pas de complaisance. Quand elle est présente à l'écran, la violence est justifié. Elle sert un propos, marque une évolution des personnages, glace le sang, fait monter la tension.
On trouve aussi également, et ça peut surprendre, distillé ci et là, un humour plus noir que le cœur des personnages principaux.
Dans ce film, la vengeance devient un objet de réflexion très poussé. Tout le propos est axé sur la loi du Talion porté à l'extrême et sur toute les questions qui en découlent. On joue sur le manichéisme qui ne devient ici qu'une bien fine limite n'appelant qu'à être transgressé.
Le héros, même si il laisse parler la plaie aussi béante que douloureuse de la perte de sa femme, ne devient il pas aussi monstrueux que le monstre qui la lui a enlevé, en devenant l'impitoyable et vicieux bourreau de celui-ci, tout en se délectant de sa souffrance, comme l'autre se délectait de la souffrance des femmes qu'il enlevait et tuait sauvagement ? De plus l'erreur étant humaine, si il finit par en commettre, tout cela ne risque pas de violemment se retourner contre lui et ses proches ? Au final, que gagne t-il réellement à jouer à ce jeu malsain, à part à se détruire, et à entraîner avec lui tous ceux qui lui sont proches ?
C'est là que la citation de Nietzsche, sur laquelle le film s'ouvre, prends tout son sens : "Que celui qui lutte avec des monstres veille à ce que cela ne le transforme pas en monstre. Si tu regardes longtemps au fond de l'abîme, l'abîme aussi regarde au fond de toi."
Au passage, je me dois de saluer la prestation de dingue de Lee Byung-Hun et de Choi Min-Sik dans le rôle des deux antagonistes. Ils le méritent.
Reste un dernier acte qui arrive un peu sans prévenir et te balance uppercut sur uppercut sans te laisser la moindre seconde de répit. Pas la moindre seconde avant le générique qui en retentissant accepte de te laisser K.O. au sol, lessivé par ce final, en train d'essayer de comprendre ce qui viens de te passer sous les yeux. Et suite à mon second visionnage, l'envie de transcrire l'effet que ce film me fait dans une bafouille s'imposait à moi. Mais au final, ces quelques paragraphes maladroits ne retranscriront jamais ce film avec une telle force que ne le fait l'un des thèmes principaux de la BO de ce film. Ce thème porte en lui tout les sentiments que j'ai pu ressentir devant ce film, et qui, telle une conclusion à ma critique, certes un peu facile de ma part, mais qui me tenait à cœur, achèvera j'en suis certain, de vous convaincre de le voir si vous ne l'avez pas vu, et de le revoir si vous l'avez déjà vu :
https://www.youtube.com/watch?v=6P-71sIQiFQ
"A ton avis, qui a gagné ?"