Independence Day vient de repasser à la télé hier, et aujourd'hui j'ai enfin vu cette bouse monumentale qui lui sert de suite, et plutôt que de faire une critique sur cet opus là (je le ferais peut-être une prochaine fois, mais y'a pas grand chose à dire), j'avais envie de parler un peu de ce film de mon enfance.


Car ouais, c'est un point assez important: j'avais 8 ans quand le film est sorti. C'est important parce que ce film-là, comme beaucoup d'autres films des années 90, c'est un film qui m'a marqué du sceau de la nostalgie. Je l'aimais déjà beaucoup à l'époque parce que faut bien admettre que - sauf rares cas - quand on est mômes, les invasions alien et tout le toutim, c'est fun, ça claque, on kiffe. On est rarement exigeant quand on à moins de 10 ans.
Il est important de noter que si ce film était sorti quand j'ai eu 30 ans... je l'aurai peut-être pas acceuilli avec autant d'enthousiasme. Mais au delà de la grosse part de nostalgie, ce film un peu naze à plein de qualités pour lui.


A commencer par le fait qu'il est nanaresque, justement. Hier je présentais à ma mère le film comme "un film monté avec les pieds mais génial". C'est l'idée générale: c'est un film qui est passable techniquement, qui ne casse pas des briques au niveau du scénario, qui a son lot de moment wtf, mais tout ça, parce que c'est assumé (peut-être), par ce que c'est drôle et parce que les acteurs sont excellents, ça en devient un film absolument jouissif qui pose toutes les bases de ce que sera le cinéma de Roland Emmerich.
On a la catastrophe; la soupe émotionnelle, des personnages insignifiants qui se révéleront importants, l'union de l'humanité dans l'adversité - tout ça c'est des éléments qu'on retrouvera dans Godzilla, dans Le Jour d'Après, dans 2012...
Emmerich à cette particularité, je trouve, de savoir prendre un scénario grandiloquent mais basique et d'en faire un objet techniquement à ce point chiadé qu'il nous fait finalement passer un bon moment où on sera pendu à l'intrigue et au suspense qu'il génère. Mais même dans ses plus grands succès on ne peut nier que la qualité du scénario lui a toujours fait défaut. Pour prendre le Jour d'Après en exemple: un film qui profite d'une réalisation soignée au millimètre, un film qui tient en haleine du début à la fin, à la technique impeccable, mais qui repose sur un scénario qui se limite à un père et son fils qui se retrouvent des liens forts alors qu'ils étaient en froid, sur fond de l'humanité cause sa propre perte; on peut chercher, il n'y à pas d'autre scénario que ça dans ce film. Mais ce qui fait que Le Jour d'Après est un succès c'est aussi parce qu'il l'a fait au bon moment - en plein milieu d'une prise de conscience écologique qui donnait à ce film un fond de vérité et de réalisme.
Je digresse, mais voilà le contexte du style Roland Emmerich: un scénario simple sur une toile de fond soignée et grandiloquente. Roland Emmerich fait du cinema spectaculaire au sens strict du terme, et il le fait plutôt bien. On sent en outre son amour du film catastrophe - il est assez connu qu'il tire son influence des films catastrophe des années 70, ses films sont jalonnés de références.


Revenons-en à Independance Day. Sa principale qualité donc, c'est sa toile de fond, la technicité sur laquelle Emmerich fait reposer son scénario simpliste. On retrouve entremêlées plusieurs histoires, des histoires de familles (et donc de couples), qui en soit n'ont que peu d'intérêt mais qui donne une dimension émotionnelle à un film qui autrement ne serait que de la baston entre humains et aliens. C'est cucul mais ça passe.
On retrouve dans l'une de ces familles le thème de la relation conflictuelle entre un père et ses enfants - thème qu'on retrouvera dans ses autres films (je n'ai pas vu toute sa filmo mais en tout cas le thème est récurrent dans tous ceux que j'ai vu, quasiment) - on sent bien que la notion de famille revêt pour lui une certaine importance.
Tout comme le thème de l'union entre les peuples contre une menace oppressante. Et pour comprendre pourquoi le thème lui tient à cœur on peut explorer deux pistes. La première: il est allemand, l'union de forces alliées contre un oppresseur meurtrier devrait nous rappeler un petit quelque chose lié à son pays d'origine. Qui plus est, considérant que - comme c'est indiqué sur sa page wikipédia en anglais, il aime à décorer ses intérieurs entre autres avec des éléments ayant trait à la Seconde Guerre Mondiale, je pense que cette période de l'histoire à pu suffisamment l'impacter - ou au moins l'intéresser - pour qu'il en glisse quelques références dans ses films et notamment dans celui-ci.
Deuxièmement, il est de notoriété publique que Roland Emmerich est gay, et soutien activement la communauté LGBT - on peut dire qu'il fait partie d'une minorité oppressée, et dans les années 90 l'homophobie était déjà pire qu'aujourd'hui, je vais pas vous faire un cours d'histoire, mais en tout cas je pense qu'Emmerich a son échelle à pu ressentir ce que c'était de se sentir menacé par des gens qui s'estimaient supérieurs à lui simplement du fait d'avoir une orientation sexuelle considérée comme étant la norme, tout comme il a pu connaitre un sentiment de différence. Je dis pas que Independance Day parle d'homophobie, mais plutôt, on peut y voir une petite ode à la différence, par la diversité de personnages qu'il nous propose (les deux personnages principaux étant un juif et un afro-américain - ce qui est relativement rare dans le paysage cinématographique, de laisser en première place non pas une mais deux minorités, sans que ça ne soit lourdement appuyé, c'est rendu anecdotique parce que juste normal), face à cette espèce extra-terrestre dont tous les membres sont uniformément identiques, et veulent assujettir la terre à leur propre fonctionnement. En somme, ces aliens sont des suprématistes qui veulent éradiquer les autres espèces - très diverses de culture comme de background social - qu'ils imaginent leur être inférieurs. On peut y voir une certaine allégorie du rejet de l'autre, de la haine de l'autre, par des oppresseurs auxquels ne peut s'opposer que l'union de communautés en minorité numéraire et stratégique. Dans Independence Day, l'humanité tout comme les communautés de minorités oppressées, sont faibles, mais pas inférieures, et unies - c'est ce qui fera la différence, c'est ce qui fera leur force.


Voilà une très belle qualité qu'on peut imputer à ce film: son message. On pourra toujours lui reprocher un mauvais scénario, et des personnages assez peu profonds dans leur développement, mais le message qu'il délivre est important, et va au-delà de la gnan-gnanterie du "les STATES vainquent!" sur fond de musique patriotique* (ce que j'ai toujours trouvé très ridicule dans ce film (mais drôle) - comme le fait que comme par hasard ils soient les seuls à comprendre où se trouve la faille des vaisseau alien - le reste du monde est un peu trop con pour piger le truc...)


*NB à propos de la musique : l'aspect patriotique de la musique est un parti pris d'Emmerich qui voulait justement cette ambiance-là, peut-être pour se moquer un peu, va savoir... Toujours est-il que ce film très américain est finalement fait par un allemand et mis en musique par un anglais (David Arnold, que vous connaissez pour la musique de Sherlock, notamment), et je trouve difficile de pas y voir une petite forme de moquerie, c'est en tout cas assez drôle je trouve. Je vais citer cette partie du wiki anglais du film, que je trouve assez fun: "The Grammy Award-winning score for the film was composed by David Arnold and recorded with an orchestra of 90, a choir of 46, "and every last ounce of stereotypical Americana he could muster for the occasion". The film's producer Dean Devlin commented that "you can leave it up to a Brit to write some of the most rousing and patriotic music in the history of American cinema." "
Ca me conforte assez dans l'idée que ce film expose des stéréotypes à dessein. D'ailleurs, ça revient assez souvent dans les films d'Emmerich. Godzilla par exemple, est bourré de stéréotypes sur les américains dont on rit - notamment cette scène avec Jean Reno et son équipe de frenchies qui mâchent des chewings-gum pour avoir l'air américain... Se moque-t-il plus des français que des américains, je ne sais pas, mais ça nous montre en tout cas que Emmerich est conscient des stéréotypes qu'il glisse dans ses films, et il les assume.


Du coup, oui Emmerich fait du film spectacle, du pur divertissement, mais pas que, en fait. Et c'est pour ça que je l'aime beaucoup, et c'est pour ça - au delà de l'aspect nostalgique - que j'aime ce film. Bien qu'un peu niais, il nous donne un beau message. Le tout enrobé d'effets spéciaux géniaux (même si y'a plein d'erreurs - vraiment plein - ça reste super bien foutu), et porté par un Will Smith et un Jeff Goldblum excellents et un humour qui n'a pas pris une ride + une petite tripotée de références au film de Spielberg Rencontres Du Troisième Type - lui-même un peu niais faut dire - qui plaisait beaucoup à Emmerich.


In fine, est-ce que ce film mérite VRAIMENT plus que la moyenne? Je pense pas. Mais pour moi, c'est un 8, je l'aime ce film, malgré tous ses gros défauts.

Créée

le 1 avr. 2019

Critique lue 616 fois

Keagan Ash

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