Le film se décompose en plans fixes majestueux agrémentés d’un sens du cadrage vertigineux. Cette mise en scène peut parfois rappeler Michel-Ange de Konchalovsky sorti l’an dernier qui était déjà une claque esthétique.
La quasi absence de dialogue participe également à instaurer une atmosphère méditative pour le spectateur. Ce dernier est transporté dans les montagnes du Piémont tant les plans larges de vallée au verdoyant contrasté par l’ombre des nuages passants sont captivants et réalistes.
Dans cette montagne, le film suit d’abord un berger aux traits marqués par le passage du temps. Il vit de manière très simple avec d’autres bergers. Très vite, une autre compagnie vient peupler cette montagne : des archéologues qui viennent explorer Il Buco : une bouche ouverte sur les entrailles de la Terre au milieu de la vallée verdoyante.
Les deux plans du récit s’alternent. Malgré une unité de lieu, cette montagne, ils sont en opposition sur la forme. Les plans plus larges et aériens de la vie du berger laissent place aux planx exiguës de l’exploration de la grotte au point d’inspirer un sentiment de claustrophobie.
Sur le fond, ils se répondent. L’exploration de la grotte sert de métaphore à l’exploration de la nature humaine. La scène lors de laquelle les archéologues atteignent l’extrémité de la grotte est directement suivie de la scène où le décès du berger est constaté. Si sur le papier, ce principe peut paraître peu subtil, tous les efforts de la mise en scène pour inspirer la quiétude lui permettent d’être léger et poétique. Mis à part cet enchaînement, le procédé et la réflexion sont plus imperceptibles. Il y a d’ailleurs une belle émotion et un sentiment de beauté dans la dernière séquence du film, lorsqu’on entend à nouveau, dans la brume, le cri tant particulier du berger disparu. C’est ce sentiment qui domine le film, celui de toucher du bout des doigts ce qui fait la beauté de la nature, humaine ou non, ce sentiment enfoui au plus profond de nous, au plus profond de la Terre, qu’un sens de la vie qui nous dépasse existe.
Enfin, on reste admiratif de la faculté de Michelangelo Frammartino à prendre un fait aussi pointu que l’exploration d’une grotte dans le Piémont pour en faire un objet de cinéma aussi universel.

Alsh74
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Top Films 2022

Créée

le 17 mai 2022

Critique lue 58 fois

1 j'aime

Alsh74

Écrit par

Critique lue 58 fois

1

D'autres avis sur Il buco

Il buco
Florian_Morel_13
8

L’intime est un écologisme.

Au milieu d’une distribution cinématographique qui se bouscule, de films qu’on a à peine le temps de voir, de films très peu distribués, Il buco fait peu de bruit. C’est regrettable mais normal, car...

le 31 mai 2022

15 j'aime

1

Il buco
Cinephile-doux
5

Au fond du trou

Avant d'entrer en salle pour découvrir Il buco, le spectateur a la possibilité de lire la brochure du Groupement National des Cinémas de Recherche, avec à l'intérieur une note d'intention du...

le 4 mai 2022

11 j'aime

Il buco
Florence_Obscur
2

La grotte

Voici ce que je me suis dit au début du visionnage : Ce film est long à démarrer…, il est vraiment très long à démarrer…mais il ne se passe rien en fait ? Mais qu’est-ce que je m’ennuie !Ce film est...

le 12 mai 2022

3 j'aime

1

Du même critique

Les Amandiers
Alsh74
3

Les Amandiers

Le film retranscrit avec peu de subtilité l'adolescence de Valeria Bruni Tedeschi et suit une promotion de l'école de théâtre des Amandiers.Les premières séquences du film montrent différents...

le 14 juin 2022

20 j'aime

1

Sans filtre
Alsh74
9

Triangle of Sadness

Le film se divise en trois parties. La première se concentre sur Carl et Aya et nous fait découvrir leur relation autour d'un problème digne d'un épisode de Curb your enthusiasm : qui doit payer...

le 30 mai 2022

11 j'aime

I Comete
Alsh74
8

I Comete

Un premier film radical, dense et ambitieux au point de s'étonner qu'il s'agit bien d'un premier film. Il faut néanmoins s'armer de patience. Le rythme est lent et le film n'est fait que de plans...

le 26 avr. 2022

7 j'aime

4