Une lettre d’amour au cinéma signée Martin Scorsese

Lors de sa sortie en salles, je n'avais pas compris pourquoi Martin Scorsese avait fait ce film. Je savais très peu de choses sur Hugo Cabret, seulement que c’était un film d’aventure fantastique pour enfant "à la Harry Potter", sur un garçon orphelin vivant dans les murs d’une gare parisienne. Dit comme ça, ça ne ressemble pas du tout à du Martin Scorsese. Mais rassurez-vous, le fantastique et l'histoire de ce garçon orphelin, ce n'est pas ce qui intéresse de prime abord le réalisateur "italo-new-yorkais".

Non, ce qui l'a attiré dans ce projet, c'était la perspective de délivrer une ode au cinéma de ses débuts et en particulier sur l'un de ses véritables pionniers, Georges Méliès. De L'Arrivée d'un train à La Ciotat (1896), l’un des courts métrages les plus célèbres des frères Lumière et qui effraya tous les spectateurs de l’époque, à Le Voyage dans la Lune (1902) de Georges Méliès et bien d’autres ... de nombreuses références sont faites aux pionniers du cinéma et c’est vraiment un régal pour tous les cinéphiles comme moi. Martin Scorsese déploie tout son talent pour démontrer le génie et l’inventivité du cinéma de ses débuts. Alors certes, à un niveau très basique c’est un film pour enfants, mais en réalité c'est aussi et surtout un film pour les plus grands.

Dans le Paris des années 1930, Hugo Cabret (Asa Butterfield) est un jeune orphelin qui vit caché dans les murs de la gare, faisant fonctionner les horloges. Le père d'Hugo (Jude Law) était un horloger, mais il est mort dans l'incendie de son atelier. Il sera accueilli à la gare par son oncle Claude (Ray Winstone), le responsable des horloges. Alcoolique notoire, il va très vite disparaitre et l'abandonner à son sort. Hugo doit alors survivre en volant du pain, du lait et d’autres aliments dans les magasins de la gare. Il doit aussi échapper à la surveillance du cruel inspecteur de gare (Sacha Baron Cohen) et de son chien "méchant".

Hugo essaie de réparer un automate, le seul souvenir qu’il a conservé de son père, volant des pièces au propriétaire d’un magasin de jouets/gadgets, Papa George (Ben Kingsley). George est un personnage grincheux, colérique et fortement énigmatique. On devine tout de suite qu'il n'est pas tout à fait celui qu'il prétend être et qu'il est est plus ou moins lié à l'automate d'Hugo. Cependant, il manque une clé en forme de cœur pour le faire fonctionner. Hugo croit que le robot possède en lui le dernier message de son père et c'est Isabelle (Chloë Grace Moretz) la petite fille de Papa George qui va l'aider à le percer à jour.

Hugo Cabret de Martin Scorsese est un film familial qui ne s’adressera probablement qu’à un public de niche, ceux qui s'intéressent à l'histoire du cinéma de ses débuts. Je ne dis pas que ça ne plaira pas à un public plus large, ça reste un conte pour petits et plus grands, parfaitement interprété, implacablement filmé et monté ... mais avouons-le, ce n’est pas un film ordinaire, c’est avant tout une lettre d’amour au cinéma. Martin Scorsese a toujours été un fervent partisan de la restauration des vieux films, dans l’espoir qu’ils seront sauvés de l’oubli (à juste titre). Hugo Cabret me semble être ce film, celui qui lui permet de plaider (magnifiquement) pour sa cause devant des millions de spectateurs. C'est sa façon de convaincre des spectateurs de découvrir des films en noir et blanc, les mêmes spectateurs qui ont probablement refusé de regarder des films en noir et blanc sur la base qu’ils sont, vous savez, en noir et blanc.

Comme je l’ai déjà mentionné, Hugo Cabret ne plaira vraiment qu’à un certain type de spectateurs. Les fervents fans du cinéma de Martin Scorsese, pourront être rebutés par le sujet traité de prime à bord (une aventure familiale). On est loin des films de gangsters qui ont fait la réputation de Martin Scorsese, à savoir Mean Streets, Taxi Driver, Les Affranchis, Casino et bien d'autres. Ainsi, Hugo Cabret ne correspond pas exactement au film habituel de Martin Scorsese. Les plus grands l'apprécieront très certainement (et les cinéphiles plus encore), mais les plus jeunes seront probablement rebutés par son rythme lent et son manque d’action. Ce n’est pas tant un film d'aventure fantastique pour enfants, qu’un voyage à la découverte du cinéma de ses débuts. Les plus jeunes auront bien du mal à s'identifier à Hugo et à Isabelle, qui finalement passent au second plan derrière la lettre d'amour au cinéma. Martin Scorsese rend son message parfaitement clair dans la dernière moitié du film, qui s’est avérée être ma partie préférée.

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le 21 mars 2023

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lessthantod

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