Quand on pense qu’Hollywood touche le fond, il existe toujours des preuves qu’il creuse encore.


Comme je le disais à propos de Kong, on a le sentiment que Warner, paniqué à l’idée de rater le train en marche, a mis tout en place pour accélérer la création d’un univers cinématographique, le fameux MonsterVerse, en allant tellement vite qu’on s’apparente davantage à du fast food qu’à une stratégie commerciale à la Marvel. Les amateurs de kaijus savent qu’il a fallu de nombreuses années, des remakes, des reboots et des crossovers en tout genre pour donner une certaine aura à Godzilla, Rodan, Mothra ou Ghidorah et en faire les incarnations des monstres au cinéma que l’on connaît aujourd’hui. Pas le temps chez Warner : on met tout le monde dans le même film et on voit si ça passe ! Ben en vrai, ça ne passe pas.


Je me sens super triste pour Michael Dougherty j’avoue, moins pour des raisons artistiques (ne connaissant rien de ce qu’a fait ce brave homme) que pour des raisons cinéphiliques : des quatre films à ce jour, aucun ne rend à ce point hommage à un demi-siècle de kaijus à la Toho que le travail de Dougherty, entre allusions claires et nettes (reprise des thèmes sonores, références directes) aux clins d’oeil discret (le bus détruit par Rodan ressemblant comme deux gouttes d’eau à celui du Rodan original).


A nouveau la bonne volonté ne fait pas un film, mais il y a chez Dougherty un véritable amour du film de monstre qui était un peu moins fort chez Edwards et absent chez Volgt-Roberts. Pas de bol, une fois encore le cinéaste bienveillant doit composer avec un scénario indigent, où les incohérences sont maîtres du jeu, où les personnages unidimensionnels sont d’un ridicule absolu (la vengeance de la mère… pitié) et ce malgré un casting alléchant (Ken Watanabe toujours présent, le sous-estimé Kyle Chandler et les toujours efficaces Zhang Ziyi et Charles Dance). Les prétextes narratifs devant combler les trous entre séquences de combats certes dantesques sont tellement faibles qu’ils finissent par diminuer l’ensemble de l’œuvre, de plus en plus désincarnée en délaissant les idées de mises en scène au profit des talents des équipes d’effets spéciaux. Certes, par endroits, ça impressionne, mais il en faut un peu plus à nouveau pour pleinement convaincre.


Pour une raison qui m’échappe après autant de décennies, les studios semblent toujours considérer les films de monstre comme un sous-genre populaire et un peu débile, ne nécessitant que de grands effets et des personnages assez policés pour ne pas devoir perdre trop de temps en écriture. Rien n’est plus faux, comme rien ne sert de courir pour construire un univers aussi dense, lucratif et exploitable que Marvel. S’il faut des experts marketings dans les studios hollywoodiens, je rêve parfois d’y soupçonner des cinéphiles et des sociologues des publics également, et je me prends à rêver de voir ce monde travailler main dans la main pour atteindre aisément les objectifs de chacun, pour le plus grand plaisir des spectateurs du monde entier. C’est parfois frustrant de se rendre compte que son imaginaire dépasse celui des blockbusters d’aujourd’hui...

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le 26 sept. 2021

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