LE polar emblématique du Nouvel Hollywood !!

Quand French Connection sort en 71, il fait l'effet d'une onde de choc, s'imposant d'entrée comme le film étendard du Nouvel Hollywood, le symbole d'une génération de réalisateurs cultivés et sales gosses ayant les pleins pouvoirs.

Le film est devenu célèbre pour son parti-pris réaliste, s'appropriant brillamment les codes, jusqu'alors marginaux pour le grand public, de deux éléments: le documentaire (William Friedkin, le réalisateur, y a fait ses armes), et les films de la Nouvelle-Vague (tournages caméra à l'épaule en extérieur, et plus en studio), le tout digéré dans un film policier haletant, empilant les moments de bravoure, rendus par ce traitement réaliste, viscéralement cinématographique .
C'est ainsi que la séquence de course poursuite dans le métro, hallucinante de réalisme, est devenu mythique, aux yeux de beaucoup la meilleure course-poursuite de l'histoire du Cinéma (Friedkin ayant donc réussi à suivre le conseil de son ancien beau-père, Howard Hawks: "Moins de parlote et toujours coller une course-poursuite pour agripper le spectateur".)

Basé sur des faits réels, le film dépeint une saisie de drogue énorme en 1962 par deux flics, Eddie Egan et Buddy Grosso, qui jouent d'ailleurs dans le film les supérieurs leur barrant la route, dans un jeu de miroir troublant.

Le film déroute de prime abord par son ouverture en France, à Marseille, suivant patiemment un criminel dans son quotidien le plus banal, avant qu'il finisse par se prendre une balle en plein visage. La note d'intention envers le spectateur est claire: le film sera sans concessions, dans le rythme comme dans la violence.

On suit ensuite le point de vue du personnage principal, le policier Popeye Doyle, on lui colle à la peau, lui cette véritable tête brûlée constamment au bord de la rupture, n'hésitant sur aucune méthode pour arriver à ses fins, (la déstabilisation avec la célèbre question incongrue "T'es tu curé les pieds à Poughkephsie?", ou la violence lors de la saisie dans le bar) et s'acharnant envers et contre tous à faire aboutir son enquête, peu lui important les retombées.
Gene Hackman est fascinant dans le rôle qui marque le début de sa carrière et lui vaut l'Oscar du meilleur acteur.
L'audace documentaire de la mise en scène nous permet d'approcher au plus près de cet acteur formidable, et de pleinement apprécier les nuances de son jeu lors de ses interactions avec les autres personnages,comprenant évidemment son duo de flics avec Roy Schneider, et ses confrontations avec le criminel Charnier.
La direction d'acteur est donc marquante par son réalisme plein de justesse, une justesse construite d'improvisations et de petits détails pertinents.


(SPOILER) Le film se conclut par une fin anxiogène, proche de la tension d'un film d'horreur. Sur une musique stressante et dissonante, Popeye s'enfonce dans les tenèbres du hangar, et un coup de pistolet est entendu hors champ, restant une interrogation pour le spectateur. On ne sait pas si Popeye a commis une autre faute en visant encore la mauvaise cible, s'il a réussi à avoir Charnier, ou si lui-même ne s'est pas fait abattre.(FIN DU SPOILER)


Exigeant, le film prend le temps de dépeindre avec une soif de véracité les faits et de coller à son personnage principal, et, après avoir connu son quotidien (l'ennui dans un bar, le réveil difficile après un coup d'un soir, surveiller un criminel dans les conditions difficiles d'un new york hivernal ), les moments de bravoure comme les moments d'égarements, force est de constater qu'on refuse de nous livrer clé en main un jugement moral univoque et simpliste.
Cette ambiguité morale absolue joue sur l"intelligence du spectateur, et marque la grande liberté créative laissée à l'époque au réalisateur tout puissant par le studio.

Tout cela aboutit à un grand film policier, un modèle du genre, emblématique de son époque.
Son héritage est également fécond, par exemple dans le monde des séries, avec The Shield, qui dépeint également les enquêtes d'un flic borderline, s'appuyant sur le traitement documentaire caméra à l'épaule de French Connection pour trouver sa propre identité.
Dalecooper
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le 23 janv. 2011

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Dalecooper

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