Tous à vos fourches, à vos faux, à vos grimoires et à vos tournevis soniques et sus au croque-mitaine !
Le troisième opus des méfaits du tueur griffu semble avoir entendu les désirs intimes des spectateurs qui s'étonnent de l'impuissance des héros de film d'épouvante face à leurs terrifiants persécuteurs et met en scène les Dream Warriors, une armée de rêveurs aptes à affronter Freddy sur son propre territoire !
Face à ces guerriers oniriques, un Krueger très en forme qui offre une admirable galerie de cauchemars. Un combat au sommet porté par un casting de rêve pour un final qui, paradoxalement va à la fois plaire et déplaire.
L'Armée des Rêveurs
Après Les Griffes de la nuit et sa suite hors de propos, la saga retrouve ses bons rails et propose la suite que le spectateur attendait. Dès les premiers instants, on renoue avec l'esprit du film de Wes Craven.
Une excellente suite, puisqu'elle prend en compte les impressions qu'ont pu avoir les spectateurs devant le premier volet et ajoute un concept qu'auront certainement imaginé les moins rassurés d'entre nous devant les films de la franchise des Freddy Krueger. Une armée de rêveurs ! Des rêveurs qui s'associent dans un rêve partagé pour affronter en force le croque-mitaine ! Une sorte d'Inception bien avant l'heure qui aurait été croisé avec les films de super-héros.
En effet, les héros de ce nouvel opus ont la capacité de devenir plus puissants dans leurs rêves et d'affronter Freddy de manière équitable. A vrai dire, ils sont des Freddy, des personnages impuissants dans le monde réel et surpuissant dans le monde des rêves. L'une d'entre eux, griffes au poing devient même la parfaite nemesis de Freddy ! Exception est cependant faite pour Nancy, l'héroïne du premier opus enfin de retour, qui a certes trouvé un moyen de bloquer Freddy mais qui n'a acquis aucun pouvoir spécifique.
Ce qui m'amène aux revers de cette médaille.
Quitte à faire revenir Nancy, plus sûre d'elle-même, plus indépendante, en mentor de l'armée des rêveurs, Les Griffes du cauchemar aurait pu dans le même temps en faire un guerrière des rêves d'expérience, enseignant à de nouveaux guerriers oniriques. Il eût été plus intéressant et plus sensé que Nancy s'engage dans ce projet, forte de ses connaissances en la matière. L'aide qu'elle apporte à des rêveurs guerriers qui s'ignorent est malheureusement hasardeuse et anarchique. Elle sait par chance, elle intervient dans les rêves de l'une d'entre eux par hasard et entend ses appels sans raison. Lors de son internement auquel La Revanche de Freddy fait référence, Nancy aurait très logiquement pu développer ce genre de pouvoir et décider d'instruire d'autres rêveurs de sa trouvaille. Jouer sur le retour de l'héroïne appréciée par les fans n'est pas une fin en soi.
Découlant de cette faille scénaristique, ces pouvoirs inexpliqués, cette origine gommée de l'armée des rêveurs. Parce que les rêveurs deviennent guerriers des rêves sur le conseil de Nancy. Ils n'ont donc aucune réelle occasion de s'entraîner et affronte Freddy en débutants forcément condamnés. Cela pour que Freddy conserve une réelle crédibilité, une capacité à faire peur. Pour qu'il demeure un danger non négligeable. C'est louable mais c'est dommage.
Le concept de l'armée des rêveurs aurait pu être davantage développé et se marier de façon bien plus jouissive à la superbe galerie des horreurs qui est l'autre point fort des Griffes du cauchemar.
La Galerie des cauchemars
L'autre point fort du film et sans doute le seul à n'apporter aucune ombre au tableau !
Les Griffes du cauchemar porte superbement bien son titre en ce sens qu'il explore le cauchemar dans toutes ses dimensions: les plus terrifiantes, les plus macabres, les plus sordides, les plus révoltantes, les plus drôles au sens aussi bien d'étrange que de comique !
Dimension effrayante dans la veine du premier opus, quand un ersatz de Johnny Depp se retrouve piégé dans son lit, suspendu au dessus d'un gouffre de flammes.
Dimension révoltante, lorsque Freddy attaque un handicapé avec une version monstrueuse de sa chaise roulante.
Dimension sadique et sordide, lorsque Freddy face à son quasi-double féminin, ex-droguée, troque ses griffes contre des seringues.
Dimension comique et étrange à la fois à de nombreuses reprises comme lorsque Freddy prend la place d'un journaliste interviewant Zsa Zsa Gabor pour l'insulter et l'agresser avant de se changer en la télévision elle-même et y encastrer la pauvre spectatrice endormie. Dimension drôle dans son plein sens lorsque Freddy semble pouvoir s'immiscer jusque dans les souvenirs d'un autre personnage et agir en tueur en série tout en reprenant au mot près la réplique d'un autre personnage !
Dimension effrayante, qui donne à la galerie des cauchemar tout son nom, lorsque Freddy apparaît aux héros dans un couloir tapissé de miroirs et que chacun des miroirs reflète un Freddy ! Un fantastique cauchemardesque digne de La Belle et la Bête de Cocteau lorsqu'en plus les reflets obtiennent une vie autonome et s'attaquent chacun à l'un des héros pour les entraîner dans les miroirs, devenus des passages entre deux dimensions du rêve !
Dimension macabre enfin, le summum de ce volet, lorsque Freddy s'amuse à jouer avec l'un des rêveurs guerriers, le tenant par ses veines et tripes démesurément allongés pour le faire marcher comme un pantin jusqu'à une fenêtre d'un étage supérieur et le faire tomber en coupant les "ficelles" de ses terribles griffes. Cette scène seule est un moment d'anthologie et une peinture sublime du cauchemar: Freddy devient géant et transforme le monde entier en une scène pour marionnette !
Une succession de visuels aussi époustouflants qu'inventifs et qui, n'était leur exagération et leur mégalomanie, tiennent tête aux terrifiantes perles du premier opus.
Un casting de rêve
Le tout, porté par un casting de rêve. De rêve tant par ce qu'il s'agit d'un casting cinq étoiles que parce que chacune des stars impliquée dans le projet a un rapport important avec le rêve, le songe, le cauchemar.
D'abord le célèbre griffeur et son iconique adversaire, Freddy et Nancy, à nouveau campés par leurs interprètes originaux, Robert Englund (aussi connu pour Wishmaster) et Heather Langenkamp (aussi connue pour des petits rôles dans Shocker ou le dizième Hellraiser)
Ensuite, Patricia Arquette, alias Allison DuBois, héroïne de la série Medium ! Quoi de mieux ? Sa doubleuse française, Séverine Morizot, la voix de l'Alice de Disney !
Mais aussi un certain "Larry Fishburne" qui n'est autre que Laurence Fishburne, à savoir le héros de la saga Matrix répondant au nom tout à fait idoine pour un Freddy de Morpheus.
On citera aussi les plus anecdotiques Jessica Rubin (Bad dreams) ou encore Brooke Bundy alias Elaine Parker, qui remettra le couvert dans Le Cauchemar de Freddy.
Et bien entendu la grande et mythique Zsa Zsa Gabor ... dans son propre rôle et qui étanche à en mourir la Soif du Mal de Freddy Krueger.
Et puisqu'on parle de mort ...
La Mort de Nancy et de Freddy
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Il fallait s'attendre à ce que l'emblématique Nancy se fasse à son tour embrocher.
A rebours d'une Sidney Prescott, qui a tout de même eu le droit à sa série de coups de couteaux dans le dernier Scream classique, Nancy ne survivra pas plus de deux fois et Freddy, tel le coyote qui aurait attrapé Bip-Bip, se fera un malsain plaisir à la griffer.
Une fin pour la belle Nancy qui plaira aux spectateurs sadiques qui regrettent encore la survie de son homologue de Scream, qui plaira aux autres pour son caractère subit et inattendu. Néanmoins, une telle fin pour une telle héroïne peut vraiment décevoir, attendu que le piège que lui tend son adversaire est gros comme une maison d'Elm Street et que la mort ainsi mise en scène n'a rien d'épique ...
Ce que l'on attendait moins, qui sera de toute façon ignoré dans les opus suivants, c'est la mort de Freddy.
Certes, le film propose au spectateur d'en apprendre raisonnablement plus sur le croque-mitaine mais cette étiologie est au service d'une fin programmée de Freddy qui est la première d'une longue liste de fausses morts du griffu. Le problème réside là encore dans la disproportion entre le personnage et la mort qu'on lui propose. Un simple exorcisme par l'enterrement chrétien, censé le faire reposer en paix malgré lui. Comme n'importe quel fantôme lambda de Supernatural ... Avouez que c'est assez décevant !
En bref, un final Nancy versus Freddy qui lorgne du côté des chutes du Reichenbach de Sherlock Holmes et James Moriarty mais qui manque de panache et d'épique et livre les deux personnages à une mort respective assez banale pour ce genre de film ou de saga.
Où Freddy appose sa griffe
Reste que ce volet de la saga est plutôt sympathique et frôle une excellence qu'il rate par manque d'ambition scénaristique, se contentant de consacrer tout son mordant - ou, en l'occurrence, son griffant - à ses impeccables visuels, tablant aussi beaucoup sur son incroyable casting.