Réalisé dans la meilleure période du réalisateur, Fog n’est pourtant pas considéré comme un classique dans la filmographie de John Carpenter. Niché entre les inoubliables Nuit des masques et New York 1997, le film est jugé plutôt mineur. S’il ne vaut peut-être pas les deux films précités et certains autres à venir, il mérite certainement mieux que sa petite réputation. Véritable récit horrifique, Fog est un film d’atmosphère aux images superbes qui traite des thèmes éternels du fantastique, à savoir ceux des fantômes et des bateaux échoués. L’introduction est remarquable avec l’histoire racontée par le vieux grand-père aux enfants qui s’assimile à une belle mise en abyme du spectateur. Elle donne parfaitement le ton du film. Bercée par la rumeur de l’océan, elle annonce un film qui va prendre son temps et qui va refuser la surenchère.
Comme très souvent chez John Carpenter, l’horreur ne s’enracine pas dans le gore. Le film n’est pas sanglant pour deux sous. Il joue sur l’effet d’attente et la surprise qui peut parfois en découler. Le passage des fantômes dans la ville, qui doit sonner comme le climax du film, n’est pas très long et pas aussi flippant qu’on peut le craindre ou l’espérer. Le malaise vient plutôt de cette ville en bordure de mer qui constitue le remarquable cadre de cette histoire. Les éléments naturels incarnent cette inquiétante menace : la mer, le vent, le brouillard. Mais en les filmant comme des « matières » vivantes, John Carpenter crée un sentiment de terreur qui fonctionne à merveille, même si, bien entendu, le film ne fait jamais peur. On pourra cependant reprocher à l’ensemble son traitement des personnages. Le souci est qu’il y a trop de personnages de premier plan et qu’ils ne sont pas tous utiles. On peine donc à s’attacher à eux. Dans le même temps, il n’y a quasiment pas de personnages secondaires intervenant dans le récit. C’est dommage.
Ce resserrement de l’intrigue autour de quelques personnages semble mettre à l’abri des fantômes toute une frange de la population. Par ailleurs, les personnages principaux manquent d’épaisseur, notamment ceux interprétés par Janet Leigh et Jamie Lee Curtis qui apportent peu de choses à l’intrigue. Enfin, en s’appuyant sur deux récits (celui du grand-père au début du film et celui du père Malone), le réalisateur prend le parti du conte un peu statique plutôt que de la reconstitution chatoyante. Un choix qui témoigne du résultat, à savoir un ensemble plutôt lent et dénué de scènes spectaculaires qui joue de la qualité de sa mise en scène pour créer une ambiance. Un choix, à mes yeux, payant mais qui peut ne pas plaire à tout le monde