Depuis Drive et Blade Runner 2049, nul n’ignore que Ryan Gosling excelle dans les rôles de mutiques. Il a l’œil larmoyant, le sourcil ombrageux et le front soucieux. Qui mieux que lui peut tenir l’écran, sans bouger, le regard fixé sur la Lune ?


Que dire de plus ? Sur une trame de blockbuster ; la course aux étoiles, le premier homme sur la Lune, deux équipages sacrifiés pour laver l’honneur des USA, humilié par les Spoutniks et Gagarine ; Damien Chazelle nous offre un film intimiste et méditatif.


Le scénario est bâti autour d’un drame intime. Le héros pleure sa fille. Neil s’abime dans la contemplation de l’astre froid. Les amis de l’aviation en seront pour leur peine, le X-15 est entraperçu et la fusée ne fait qu’une fugace apparition. C’est dommage, car une Saturn, de près, c’est merveilleusement obsolète : 118 tonnes de tôle, d’hydrogène et d’oxygène liquides, des kilomètres de câbles et de simples boutons poussoir et ça vole !


L’essentiel est perçu par les sens de Neil Armstrong. Nous ne voyons rien. Nous sentons, vibrons et écoutons la tôle souffrir, craquer et crier. Neil entrevoit des flammes et de la poussière, un bout de ciel, le vide stellaire et le cul d’un satellite.


Jadis, Claire Foy (Janet Shearon) a été séduite par le calme et la force dégagée par le pilote. Elle aspirait à la sécurité et à la stabilité. Mauvaise pioche. L’épouse délaissée incarne la vie et la mère courage.


Ryan parle peu mais conserve l’œil expressif. Le soleil vient jouer dans son iris. Le travail sur la lumière est admirable. Tel un chaton, Chazelle joue inlassablement avec un reflet sur le casque du cosmonaute, son cockpit ou une simple vitre du pavillon de la famille Armstrong.


Neil est le meilleur. Il rattrape les vrilles fatales, pose les prototypes en perdition, calcule de tête les corrections et pilote en manuel. Pourquoi ? Nous n’en saurons rien. Neil se tait, il est ailleurs.

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le 5 nov. 2018

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Step de Boisse

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