Quand j’étais petit, je voulais devenir astronaute. Comme bien des enfants de cette génération, j’ai rêvé des cieux, en compagnie de ce qui reste à mes yeux, la plus brillante réussite technologique du genre humain. Je veux bien sûrs parler de l’alunissage d’Apollo 11. Il y en eu d’autres après, qui y retournèrent, mais cette première mission était un modèle, pour l’enfant que j’étais. En une dizaine d’année, et au prix de multiples échecs, la longue course à l’espace fût remportée de la manière la plus prestigieuse possible. Tout le monde connait cette histoire, que l’on ait été devant son écran de télévision le 20 juillet 1969 ou non. Depuis j’ai grandis, et comme beaucoup d’enfants rêvant de l’espace, je n’y suis toujours pas allé. Mais ma curiosité pour ce domaine demeure intacte.


Aujourd’hui, Damien Chazelle, réalisateur de l’excellent “La La Land“ et de "Whiplash" (que je n’ai toujours pas vu à l’heure où je rédige ces lignes) nous présente un biopic du Premier Homme, le désormais très célèbre Neil Armstrong. Scénarisé d’après la biographie que James R. Hansen fit de l’homme, et interprété par le tout aussi connu Ryan Gosling, le film retrace les dix années qui séparèrent son entrée à la NASA et son alunissage. Bien évidemment, dès la première annonce de ce film, mon impatience était incommensurable. Je connaissais les faits en eux-mêmes, mais pas la vie d’Armstrong en détail. J’étais curieux de voir quel angle Chazelle allait utiliser pour narrer son récit, quelle approche lui donner. Car à travers la légende, il existe milles et unes approches différentes, de la plus sobre à la plus frappante.


En définitive, Damien Chazelle a préféré de ne pas nous parler de la légende, mais bien de l’homme. Mettant de côté tout aspect superflu, brave ou héroïque, il fait le choix de nous dépeindre la vie d’une personne avec ses réussites et ses problèmes. Choix pour le moins percutant et judicieux, permettant de nous mettre constamment à la place du protagoniste.


Réalisateur méticuleux, Chazelle prend grand soin de nous installer au plus près d’Armstrong, employant beaucoup de plans rapprochés et de shaky cam, afin d’établir un contact presque physique entre nous et son protagoniste. Les phases spatiales sot en cela impressionnantes, qu’elles prennent encore une tout autre dimension, tremblant au point de ne plus reconnaitre le haut du bas, ni même quel visage se cache derrière quel scaphandre. La promiscuité des habitacles que l’on retrouve en permanence, qu’il s’agisse d’un cockpit d’avion ou d’un module spatial, rend encore plus étroit le contact que l’on ressent avec les différentes personnes situées de l’autre côté de l’écran. Rarement une telle impression de claustrophobie m’aura pris à la gorge pendant une séance de cinéma, rendant parfaitement hommages aux conditions incroyablement précaires dans lesquelles se trouvaient les astronautes de l’époque.


Au-delà d’une réalisation presque charnelle, le travail sur la photographie et la direction artistique est à saluer. Linus Sandgren rend parfaitement hommage aux années 60 avec un étalonnage de couleurs chaudes sur Terre mais choisissant un cadre beaucoup plus austère lorsque le film prend de l’altitude. A cela s’ajoute un travail sur les décors et les costumes fort à propos, permettant d’obtenir une cohésion assez parfaite avec la décennie dans laquelle se déroule le récit. De plus, les maquettes des différents appareils des missions Gemini 8 et Apollo 11 sont assez impressionnant.


Parmi les énormes points fort du film, on notera la place importante que prend la musique dans ce film, bien que passant par instants pour minimalistes. Justin Hurwitz, déjà à l’œuvre pour les deux précédentes œuvres de Chazelle, signe ici une symphonie d’une simplicité et d’une beauté à nulle autre pareil. S’incorporant très bien au récit, elle l’accompagne tout du long, sachant rester à bonne distance par instants, mais s’invitant de tout son poids lorsque cela est nécessaire. Aussi douce que belle, mais toujours percutante, c’est en tout cas un des indispensables de cet ensemble déjà bien réussis.


Le film possède aussi d’autres points forts, comme un casting assez varié et présentant des personnages secondaires tout aussi différents. On retrouvera par exemple Kyle Chandler, Jason Clarke ou encore Corey Stoll, curieux choix pour incarner Buzz Aldrin mais qui s’avérera finalement payant. Bien entendu, le fait de placer la caméra aussi près d’Armstrong limite considérablement les temps d’apparitions de chaque personnage, les cantonnant pour la plupart à de brèves apparitions par moments. Seule Claire Foy, qui interprète Janet, la compagne de Neil, semble bénéficier d’un traitement la mettant en valeur, et lui confiant de l’importance.


Si je parle aussi tardivement de l’interprétation de Ryan Gosling, c’est bien parce que je ne sais pas trop quoi en penser. Certes, il s’en sort incroyablement bien, comme à son habitude mais… Eh bien Gosling fait du Gosling. Je trouve personnellement que malgré son excellent travail dans de précédents films comme Blade Runner 2049 ou La La Land, il reste lui-même, et ne se fond que difficilement dans la peau de celui qu’il lui faut incarner. Et même si l’acteur reste très bon, ce n’est jamais vraiment Neil Armstrong que je voyais à l’écran, mais son interprétation par Ryan Gosling. La nuance est là, et reste toujours dérangeante, l’empêchant de transcender son rôle.


Exception faite de ces quelques points, le film est véritablement incroyable. Touchant, prenant, émouvant, parfois lent et parfois tellement rapide, la narration ne souffre d’aucun défaut. Les trois grosses scènes spatiales qui jalonnent une aventure totalement terrestre sont folles de puissance et de réalisme, et les raccourcis fait dans l’aspect purement scientifique permettant au néophyte d’entrer dans le film ne sont jamais flagrants ou dérangeants.


Pur produit d’un rêve d’enfant devenu adulte, First Man est très probablement mon plus gros coup de cœur de l’année, avec le dernier Spielberg. La légende d’Armstrong et l’histoire de Neil se mélange pour donner une toute autre chose, plus belle encore. Celle d’un homme qui leva les yeux au ciel, et finit par ne fait qu’un avec les astres.

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le 12 oct. 2018

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Sherns Valade

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