William Harford, médecin, mène une paisible existence familiale. Jusqu'au jour où sa femme, Alice, lui avoue avoir eut le désir de le tromper quelques mois auparavant. Harford part déambuler dans la nuit, et fait face à ses fantasmes.

Dernier film de Kubrick, Eyes Wide Shut peut s’inscrire dans la veine des films les plus choquants et provocateurs de son auteur, à savoir Lolita, dans lequel il contait une histoire d’amour impossible entre un vieil homme et une adolescente, et Orange Mécanique, dans lequel il s’attachait à mettre en scène la violence sous toutes ses formes, mais surtout gratuite. Eyes Wide Shut est une œuvre sur la libido, et sûrement l’un des films les plus fantasmagoriques de son auteur. Tout du long, Tom Cruise ère dans la ville, comme dans un labyrinthe, et le spectateur au final a la sensation de sortir d’un long rêve (érotique, bien sûr), ou peut-être d’un cauchemar.

Le thème essentiel du film est bien celui de la mince frontière entre fantasme et réalité (ce qui est d’ailleurs résumé dans l’épilogue entre Cruise et Kidman). Alice a-t-elle bien trompé son mari ou ce dernier ne fait-il que fantasmer ? De même, les péripéties que vit Hardford semblent tellement romanesques et folles qu'elle paraissent rêvées. Kubrick joue brillamment de ces hésitations, ses choix esthétiques donnant un aspect étonnement réaliste aux scènes les plus théâtrales voire grotesques.

Eyes Wide Shut, œuvre sur le fantasme, le sexe, sur la frontière entre rêve et réalité, une œuvre sans pudeur et choquante jusqu’à la réplique finale si provocatrice. Le film est encore une fois très réussi esthétiquement, avec une séquence phare, celle du rituel orgiaque. Kubrick filme la nudité avec audace, en particulier celle d'une actrice aussi célèbre que Nicole Kidman, et l'on ne peut qu'être troublé par la vision de ces deux acteurs mondialement connus livrant ainsi une illusion de leur intimité. Ainsi, avec ce long rêve érotique en guise de testament, Kubrick laisse de nouvelles images frappantes qui resteront gravées dans l’imaginaire de ses spectateurs, surtout quand ils auront leurs yeux grand fermés.
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le 27 sept. 2012

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