Exte
6.3
Exte

Film de Sion Sono (2007)


  1. Dupieux sort Rubber, le film d'horreur sur un pneu tueur. Trois ans avant, Sono Sion met notre âme sous pression avec son film sur les extensions.


Dans un port, une jeune femme est retrouvée morte, debout dans un énorme container rempli de cheveux, une mystérieuse clochette accrochée au doigt. Je n'ai pas compris le rôle de la clochette. A partir de là tout n'est plus que cheveu. On pense à la Méduse antique, aux cheveux-serpents. En un sens c'est pire dans Exte, plus sombre, plus dérangeant, plus japonais, car les serpents sont autonomes, ils ont une vie indépendamment de leur tête d'origine. Des cheveux noirs, de longs cheveux noirs, de belles images de cheveux inquiétants, des cheveux qui croissent de manière démesurée, qui s'insinuent partout, qui s'enroulent partout, qui poussent n'importe où, sur la peau, sous la peau, ou sous la boîte crânienne pour aller vers les yeux et en recouvrir les globes.


Et puis à côté de ça, avec son aimable, sa douce dinguerie, Sono Sion vous fait une sorte de sitcom familiale et colorée centrée sur le personnage de Yuko, apprentie coiffeuse dans un salon répondant au doux nom de "Gilles de Rais", le célèbre aristocrate psychopathe du XVe siècle (tout est normal). Je ne résiste pas à la tentation de décrire la séquence où l'on voit Yuko pour la première fois. Une minute avant c'est un film d'horreur glauque et nocturne, puis ça devient une sorte de remake déglingué d'Amélie Poulain, avec la jeune fille sur son vélo qui se rend à son travail, toute enthousiaste, sur fond de petite guitare naïve. Elle se présente au spectateur, présente sa ville. Ici il y a un temple, là un chemin de fer, et là c'est la mer. Elle est énergique, joyeuse ("une nouvelle journée qui commence!") mais bizarrement elle parle d'elle à la troisième personne. Enfin non je me trompe, elle parle d'elle en discours direct : "Oh non je vais encore être en retard ! dit-elle". Ce qui instaure une curieuse atmosphère, une atmosphère artificielle de narration qui marche plutôt bien. J'ai bien aimé aussi le fait qu'une fois arrivé au salon ses collègues se prennent au jeu et se mettent aussi à utiliser ce mode de discours. Je ne sais pas pourquoi. J'aurais souhaité que ça dure tout le film mais le reste du film.. comment dire ? Quand le film d'horreur est trop glauque, surgit le personnage de l'employé de la morgue complètement barré qui joue de la guitare. Quand la sitcom est trop niaise surgit une mère effroyable qui bat sa fille. Et tant d'autres choses encore.


Bref j'ai cherché un peu la formule Sono Sion, et les mots qui me sont venus à l'occasion d'Exte sont : le mélange, la satire, peut-être la saturation des genres. Surtout la bigarrure. Tout est mélangé, c'est un peu (beaucoup) le bordel. Et finalement, c'est plutôt plaisant.


7 clochettes sur 10.

LeJardindesIdees
6

Créée

le 11 sept. 2021

Critique lue 84 fois

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