L'attente d'un événement

Si je devais résumer l'histoire du film, ce serait "l'attente d'un événement".

Esthétiquement parlant, c'est très joli. Les plans sont longs, avec une jolie lumière. Le film n'est pas trop long, il réussit à retenir l'attention jusqu'au bout. On voit bien l'amour pour les images avec les scènes de développement de photos. Le réalisateur joue sur les silences, les rares musiques (la scène du piano par exemple), et c'est franchement réussi.

Mais sur le plan de l'histoire en elle-même, je trouve le film très moyen.

Le réalisateur a probablement voulu représenter un lycée ordinaire avec des lycéens ordinaires, ce qui est une bonne idée en soi. On pense que c'est l'histoire d'une journée normale. Tous ce que font les personnages sont normaux : ils prennent des photos, vont en cours, mangent à la cantine. Génial. On sent bien que quelque chose doit se passer, c'est gros comme un éléphant (pardon, il fallait que je la fasse). Mais c'est regrettable qu'une grande partie du film soit consacrée à la vie des lycéens sans qu'il y ait pour autant beaucoup de détails sur l'événement en question.
Aussi les personnages ne sont pas du tout développés et on tombe dans les clichés pas vraiment réalistes que l'on peut voir dans une grande partie des teen movies : les filles superficielles qui ne mangent que de la salade et se font vomir aux toilettes, le sportif "populaire", la fille qui n'a pas confiance en elle et mise à l'écart. Mais le plus beau à mes yeux : le garçon joueur de jeux vidéos qui finit par assassiner tout le monde comme s'il était dans l'un de ces jeux. Cliché qui peut vite faire penser au discours "attention les jeux vidéos sont dangereux".

Le film ne laisse transparaître aucune émotion. Si vous cherchez du pathos, visionnez autre chose. Et pourtant l'histoire est un drame. Or le massacre est presque représenté comme un événement normal, que l'on voit venir dès le début, et qui pourrait se passer n'importe où. Je n'ai pas réussi à me sentir à la place de l'un des personnages ou à être touchée par l'un ou par l'autre. Les tirs ne sont plus si choquants puisqu'on s'attend à ce qu'ils arrivent. L'intérêt se trouve plutôt sur le fait que l'histoire se passa dans un lycée d'Amérique lambda, avec des élèves lambdas mais que n'importe quel individu peut avoir accès facilement aux armes et tuer d'autres personnes. Et c'est ça qui est choquant. Mais Gus Van Sant n'a pas su apporter le petit éclat qui interpelle et chamboule les pensées. Des questions restent encore en suspens. Dommage.