
Film d'ambiance à l'atmosphère pesante et jouissant d'un symbolisme exacerbé, " Elephant " s'apparente finalement plus à une étude anthropologique qu'à une fiction.
Et pour que son film soit le plus réaliste possible, Van Sant a laissé la part belle à l'improvisation et tourné avec des acteurs non professionnels dans un lycée de Portland, sans scénario précis. Pari audacieux et réussi.
Dès les premiers plans, le réalisme se fait saisissant, presque glauque. La caméra observe, dissèque des lycéens fantomatiques. L'établissement, que le réalisateur explore durant d'interminables travellings, devient un espace mystique et claustrophobique, un labyrinthe de longs couloirs de verre.
Gus Van Sant ne cherche pas à expliquer quoi que ce soit. Il se contente d'énoncer. Pas de voix off explicative, aucun chiffre, " Elephant " n'est pas un film militant. C'est au spectateur de se forger une opinion. Reste que la caméra n'est jamais objective et qu'elle restitue immanquablement le point de vue de celui qui la tient.
L'angle choisi par le réalisateur mérite toute notre attention. " Elephant " tient du cauchemar tant Van Sant met l'Amérique efficacement face à ses démons. Mais il rompt également le silence de mort qui succède aux balles. Une expérience éprouvante mais précieuse.