Pour la énième fois, ne pas se fier à une bande-annonce. Car pour Eastern Boys, ce trailer annonçait un petit film intéressant, mais aussi très bizarroïde et plutôt inégal.
Mais Eastern Boys est pour l'instant une des rares vraies claques prises au cinéma cette année. Aussi cru que pudique, ce film est un véritable objet de curiosité. C'est l'histoire d'un homme qui, dans une longue et intrigante première séquence (1- Sa majesté la rue), aborde un jeune prostitué ukrainien, puis qui, le lendemain, assiste médusé au piège dans lequel il vient d'être pris (2- Cette fête dont je suis l'otage).
Déjà, Robin Campillo surprend en filmant la périphérie de Paris. Il saisit sous tous les angles, à tout moment de la journée, cet environnement un peu retiré, étrangement calme. L'appartement où se passe une bonne partie du film, où la relation d'abord sexuelle entre Marek et Daniel évolue progressivement (3- Ce qu'on fabrique ensemble), est un véritable personnage à part. Cet appartement, même quand on en sort, nous suit toujours, où qu'on aille. Tout ce que touche Robin Campillo devient gracieux, mystérieux, parfois inquiétant. Il cultive à merveille ce lien bizarre, ce rapport à l'étranger. Ce jeune ukrainien, de plus en plus attachant, ne se dévoile jamais vraiment, révélant sans trop le vouloir quelques éléments un peu flous sur son passé. Ce jeune ukrainien qui finalement, au fond de lui, recherche désespérément une attache, lassé de cette vie " en bande". Qui, dans une scène magnifique où pétaradent au loin des feux d'artifice, semble hanté par le souvenir des bombes dans un pays qu'il a du fuir.
Mais pendant cette longue partie du film, presque en huis clos, on sent bien que le réalisateur veut nous emmener quelque part. Vers quelque chose qui semble à la fois inévitable et si loin. La scène des avions, presque hypnotique, symbolise peut-être la proximité d'un élément perturbateur dont on ne peut que s'inquiéter, un peu à la manière du ciel orageux dans Elephant de Gus van Sant. Et là, effectivement, arrive la fin du film. Insoutenable de par le suspens qu'elle installe, elle tient tout simplement du génie. Toute cette dernière partie à l'hôtel (4- Halt Hotel- Donjons et dragons) vient chambouler une situation aussi étrange que fragile, tandis que notre coeur bat, que nos doigts se cramponnent au fauteuil, pour finalement aboutir à un final libérateur, intéressant et surtout parfaitement réussi.
Un des éléments qui ajoutent au film un charme particulier est le découpage en quatre parties (numérotées de 1 à 4 dans ma critique, vous l'aurez remarqué) aux titres évocateurs et poétiques. Le jeu des acteurs est dans l'ensemble très convaincant, avec une mention toute spéciale à l'excellent Danil Vorobyev, interprète du très étrange personnage de Boss.
Bref, une claque aussi réjouissante qu'inattendue.
HugoLRD
9
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le 13 avr. 2014

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HugoLRD

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