Avec Dragons, Dreamworks avait déniché un sacré filon. L'histoire du premier était amusante, touchante, inventive et jolie ce qui était plutôt l'apanage des films Pixar (il fut un temps). Bref, Dreamworks venait de trouver là le moyen d'acquérir ses lettres de noblesse. Et puis, vint l'inévitable suite. Les premiers teasers laissaient présager d'une audace narrative (le héros Hiccup a bien grandi).

Malheureusement, il n'en est rien et la bonne surprise du premier laisse place à un film mou et mal rythmé, sauvé par son humour et quelques moments réussis. Le tout reste néanmoins hyper-paresseux-reposons-nous-sur-nos-lauriers. Aïe.

(1) J'ai un immense problème avec le rythme du film, qui commence par une scène assez longue où le héros et sa petite amie posent le problème. Que faut-il raconter maintenant que tout le monde vit en paix avec les dragons ? Hiccup aborde assez vite le sujet de sa mère - qu'il n'a pas connu - et on sent assez rapidement que c'est là que le film souhaite nous emmener. Soit. C'est classique, c'est cliché, mais OK. J'attends de voir ce que le film a à me montrer.

(2) La bonne surprise du film, car il y en a une, c'est Cate Blanchett que j'ai trouvé très juste dans son rôle. Un peu flippante, un peu folle, elle parvient presque (presque !) à nous vendre l'abandon de son fils pour s'occuper de dragons. J'aurais été très client de l'idée si une autre chose ne m'avait pas gêné (j'y reviendrai).

(3) Enfin, l'animation est très réussie. On est pas vraiment dans l'uncanny valley mais par moments c'est vraiment très réaliste, au niveau des mouvements et des expressions. J'ai trouvé ça vraiment intéressant.


J'ai beaucoup de problèmes en revanche avec les points suivants :

(4) le fait que les parents de Hiccup se remettent ensemble (même si cela est bref) est un tel poncif et tellement conformiste que ça m'a un peu déçu du film. La façon dont le père agit néanmoins est plutôt louable, puisque jamais il ne force la mère à rien. Mais j'ai été gêné par ce triomphe assourdissant de la famille nucléaire dans un film qui se veut anticonformiste avec un personnage gay qui tient une place aussi importante.

(5) Plus problématique, le méchant du film qui est méchant car méchant. Transparent au possible, ni malin, ni intéressant, j'ai trouvé qu'il constituait une menace faible et sans aucun intérêt. Il est possible que la simple histoire de la mère n'ait pas suffit et qu'ils ont donc rajouté cette intrigue, qui est pour moi absolument dispensable et introduit des concepts idiots. Cette hiérarchie en alpha des dragons, c'est juste... ugh, complètement naze. Enfin, cela aurait pu être intéressant si cela avait été exploité correctement. Ici, on a donc un dragon gigantesque que le méchant contrôle en criant. Euh, OK... on ne pourrait pas imaginer que le méchant ait produit des inventions un peu comme Hiccup qui permettent de contrôler un dragon ? Jouer de la musique ? Non ? Non. Donc, le méchant contrôle les dragons en criant. Il a aussi toute une armée trop puissante, mais elle disparait une fois que paraissent les dragons. Parce que qui a besoin d'une armée quand on a un dragon ? Je n'ai aucune idée de ce qu'il est advenu de cette armée badass et qui aurait pu être intéressante après la mort du gentil alpha.

(6) Encore plus problématique et selon moi contradictoire du premier film : le conformisme. Hiccup croit qu'il existe une autre solution, différente des deux voies représentées par son père et sa mère. Bien qu'il soit présenté dans le film comme un naïf idéaliste, on a envie de croire qu'il va trouver une autre solution, la voie du dialogue. Dans la plupart des films, le conflit est vu comme l'unique solution pour régler un problème - ce qui fait que la plupart des héros présentent des qualités utiles dans un conflit : le courage, la force etc. C'est ce qui rend les héros fades, génériques et interchangeables. Il me semblait que le film allait à contre-courant de cela, et malheureusement, ce n'est pas le cas. Ou à tout le moins, le film fait un très mauvais boulot à ce niveau-là. Hiccup paie cher son idéalisme : son propre dragon tue son père. Rien que ça. Ce rebondissement aurait pu avoir une force incroyable s'il n'était pas traité complètement n'importe comment, en le vidant totalement de son impact émotionnel (sur le coup, c'est juste raté). Finalement, Hiccup devient chef, donc, comme son père le voulait, et il sauve son village en agissant un peu comme son père, en chef. De personnage novateur et différent, on se retrouve avec un héros classique. Encore. Snif.

(7) Enfin, et pour finir, mon problème principal et majeur avec ce film est la façon dont il présente les dragons : ces créatures majestueuses sont ravalées au rang d'animaux de compagnie. Au lieu de nous présenter les dragons comme des égaux, ils sont des soumis voire des esclaves. C'était LÀ que se trouvait la solution du film, la manière de vaincre le méchant, d'unifier les voies du père et de la mère, de faire de Hiccup un héros novateur. C'était ce qu'il fallait faire, c'était logique. Et le film est passé complètement à côté. Hiccup persiste à appeler Toothless "buddy", "friend" etc. Alors que le seul et unique nom qu'il devait lui donner c'était "brother" c'est à dire faire de Toothless son égal. La mère d'Hiccup a choisi de faire des dragons sa famille, en ce sens, elle a rejeté Hiccup (considéré comme faible à la naissance). C'est là que Hiccup aurait pu rallier sa mère à sa cause, en lui montrant qu'il considérait désormais les dragons comme ses égaux. Pas comme des animaux domestiqués ou de compagnie, mais comme des animaux qui choisissent d'aider d'autres animaux. Cette servilité des dragons, même volontaire est juste sans aucun intérêt et vraiment problématique. On avait là le moyen de résoudre le problème final de l'alpha - les dragons choisissent de ne pas s'y soumettre, un truc comme ça. Au lieu de ça, on a Toothless qui est tout petit et qui affronte le gros dragon pour sa dominance, et gagne - le parallèle entre Hiccup chef et Toothless chef est mauvais mais en plus biaisé puisque les deux ne sont pas égaux. Ils ne font même pas partie du même monde.

Sinon, j'ai bien aimé le film, hein.
Hameçon
7
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le 17 juil. 2014

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Hameçon

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