"Don't Breathe" ou une maîtrise de la tension viscérale exemplaire.

Remarqué par son remake du film culte de Sam Raimi « Evil Dead » sorti en 2013, le cinéaste Fede Alvarez signe avec son deuxième long métrage, « Don’t Breathe », un thriller huit-clos dans lequel trois adolescents rêvant de s’échapper de la pauvreté des quartiers de Détroit, décide de s'introduire dans la maison d'un ancien vétéran de la guerre d’Irak, retraité et aveugle, pour lui voler une somme d'argent plutôt importante verser comme un dédommagement suite à un accident dont il ne vaut mieux pas préciser la nature afin de conserver au maximum l'intrigue du film.


Pensant que voler un aveugle dans sa maison est chose facile, les jeunes braqueurs s’aventurent dans le territoire d’un homme dont les séquelles de la guerre d’Irak l’ont transformé en véritable machine à tuer, la maison étant un lieu que le vieil homme connaît bien plus que ces jeunes gens, l’espace dans lequel se déroule ce huis-clos d’une tension redoutable étant la représentation de l’espace mental de son occupant. En effet, la maison représente ici un personnage à elle tout seul, car si l’horreur se passe principalement à l’exposition de la lumière,


à l’exception d’une scène dans le noir, probablement la meilleur du film, où le spectateur est placé en position de voyeur avec la vision nocturne, étant le seul à voir ce qui se passe dans le noir (une excellente maitrise de mise en scène à souligner pour le coup),


elle n’en est que plus brutal.


En effet, Fede Alvarez, à quelques exceptions près, a décidé de ranger la méthode du jump scare putassier au placard pour privilégier un véritable travail d’ambiance et de mise en scène, où la tension est maître entre les murs de la maison, nous rappelant sans cesse que les personnages sont dans la même pièce que le papi vétéran en colère et que la seule chose qui les séparent de lui, c’est le fait qu’il soit aveugle. Mais qui dit aveugle dit que les autres sens sont développées, particulièrement l’ouïe et c’est là dessus que Alvarez fait preuve d’une maîtrise et d’une inventivité folle dans sa mise en scène. À défaut d’un scénario peu développé, le cinéaste ne cherchant ici qu’à rendre son film viscérale et tendu, là où un Wes Craven aurait approfondi un peu plus le caractère politique, Alvarez tente en vain de politiser son sujet, nous parlant d’une jeunesse américaine à la recherche de l’« American Dream » hors d’un Détroit hanté par sa condition sociale pauvre.


La grande efficacité ici, c’est cette mise en scène qui ramène constamment ces personnages dans cette maison infernale, ne leur laissant aucun répit dans un rythme effréné qui ne faiblit guère pendant 1H20. Le dernier film en date ayant cette maîtrise d'un rythme « grand-huit » infernale était « REC » de Jaume Balaguero et Paco Plaza, sortie en 2007, qui ne laissait presque aucun temps mort aux nombreux occupants de l’immeuble infecté que filmait la caméra des reporters en « Found Footage » (le film reste à ce jour un des meilleurs exercice de style du genre après « The Project Blair Witch » en 1999).


Même si il ne réinvente pas le genre et qu’il n’est pas aussi politisé que le cinéma de genre des grands cinéastes comme Craven, « Don’t Breathe » est d’une efficacité redoutable, un huit-clos viscérale maîtrisé par un jeune cinéaste de genre Uruguayen qui se fait une place dans l’industrie Hollywoodienne, et son inventivité et sa maîtrise sont à saluer dans le paysage actuel de ce que nous propose le cinéma d’horreur américain.

GalDelachapelle
7
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le 28 oct. 2016

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