Souvenez-vous : en 2013, Marc Forster nous gratifiait, dans un World War Z décevant, d’une scène où des zombies survoltés déciment un avion entier. Yeon Sang-ho applique ici le même principe, mais déporte cette fois l’intrigue en Corée, dans un TGV parcourant un pays en pleine apocalypse. Les similitudes entre les deux oeuvres ne s’arrêtent pas là, toutes deux s'accommodant d'un même genre, le blockbuster horrifique, et faisant la part belle aux morts-vivants. La bonne réception de Dernier train pour Busan n’en est finalement que plus surprenante.


Il ne s'agit évidemment pas de taire ses tentatives les plus louables : gestion habile de l'espace ; caméra circulaire dans une toilette, avec jeu de miroir ; plans saisissants, dont celui d'une fillette immobile pendant que des masses zombifiées se ruent derrière elle ; tableaux apocalyptiques spectaculaires et souvent soignés ; réalisation nerveuse et quelquefois ambitieuse... Mais ces caractéristiques dissimulent mal bon nombre de clichés, d'incohérences et de faiblesses conceptuelles : une femme enceinte parvenant à rattraper à la course un train en marche ; le regard culpabilisant d’une petite fille envers son père, lequel se veut naturellement en quête de rédemption ; des jeunes gens gorgés d’altruisme et de vertus ; un grand patron cynique, absolument insensible aux autres et prêt à sacrifier n'importe qui pour son propre salut ; des processus de zombification dont la durée peut sensiblement varier selon l’importance des personnages et/ou les besoins de l’intrigue…


Difficile de ne pas croire que s’il s’était agi d’un film américain, la critique aurait été autrement plus sévère. Elle aurait certainement moqué ces valeurs familiales péniblement véhiculées. Elle aurait sans doute trouvé sommaire le traitement des différents caractères. Elle aurait peut-être pointé du doigt les limites d’un scénario filiforme dont la première préoccupation semble être sa fonctionnalité. Elle aurait surtout déploré une certaine paresse d'écriture et un déficit évident d'inventivité.

Cultural_Mind
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le 24 févr. 2017

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