Du haut de sa carrière pléthorique, Sylvester Stallone possède bien des visages : ceux emblématiques, les costauds avant tout, les rigolos ou encore les tourmentés. Bien sûr, raisonner de la sorte n’a pas de sens tant un rôle peut marier les genres, au même titre que ce serait un tort que de réduire l’interprète à la paire Rocky & Rambo : tout ceci pour dire que le bonhomme est, de par sa versatilité et la profondeur de sa filmographie, proprement fascinant.


Les années 90, qui ne furent pas les plus fastes pour l’acteur, l’illustrent parfaitement : le cinquième Rocky, de la comédie (Stop! Or My Mom Will Shoot), de l’action plus ou moins fine (Cliffhanger, Daylight), du contre-emploi (Cop Land)... et une paire de longs-métrages de science-fiction, parmi lesquels l’inestimable Demolition Man. Non pas que celui-ci soit fantastique au sens mélioratif du terme, mais le contraste entre son pitch simpliste, son concept à potentiel et ses incroyables largesses en font un divertissement immanquable.


Car sous ses dehors idiots, ce script passé entre de nombreuses mains ne saurait se résumer à un duel binaire : le principe d’une société désarmée et non-violente, résultante d’une catastrophe naturelle ayant conduit à une profonde reformulation civique et sociétale, agrémente le récit d’une multitude de petites idées isolément pertinentes. Certes, Demolition Man se fait un devoir de forcer en tous points le trait, la police des mœurs et une technologie au service de la surveillance généralisée alimentant des gags en pagaille, mais le fond demeure. C’est dans pareil décorum que le retour à la vie de John Spartan, archétype du soldat sur-efficace mais destructeur, nourrit une dichotomie intrigante sur le papier.


Seulement voilà, comme évoqué le long-métrage n’est guère finaud dans son exécution : les blagues foisonnent, la tension est aux abonnés absents et les enjeux se trouvent peu à peu vidés de toute substance. La folie relative de Simon Phoenix n’est guère crédible et son tenace adversaire possède bien peu de relief : pour l’essentiel, Demolition Man n’est que très peu passionnant. Pourtant, dans le même temps, son contexte, son humour généreux et le contraste entre la gravité des faits et la légèreté du traitement, caractérisé par des dialogues parfois lunaires, composent quelque chose d’inattendu : une patte, aussi risible soit-elle (certains parleront de navet, d’autres de nanar), venant sauver les meubles en muant le film en un divertissement bête et amusant.


Improbable donc, à l’image finalement de la longue carrière de ce cher Sylvestre : du bon et du moins bon, mais qui ne laisse jamais (ou alors rarement) indifférent.

NiERONiMO
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le 19 sept. 2022

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