4em film de cette année 2021 et 1er long métrage français, je rattrape un classique du genre trop peu visible dans le cinéma francophone, le fantastique.
On découvre la vie des étranges habitants d'un immeuble de banlieue situé dans un immense terrain vague dans un univers post-guerre dans un ville détruite où règne la famine et qui tous vont se fournir chez le boucher-charcutier, à l'enseigne "Delicatessen".
Portée par un style visuel atypique forgé au cours de d'une collaboration des deux réalisateurs Marc Caro et Jean-Pierre Jeunet de près de 13 ans au moment de la sortie du métrage en 1991, leur univers dépote du carcan du film français traditionnel.
En effet, cette proposition artistique mélange les styles et les inspirations allant de celui originel de Georges Méliès fait à partir de trucages physiques et autres bizarreries rendant un style si particulier et l'atmosphère poisseux et post apocalyptique d'un Blade Runner mais en plus chaleureux grâce notamment à une patine visuelle jaunâtre et un ton scénique plus enjoué.
Que ce soit le découpage scénique, le séquençage, la composition des cadres, l'enchainement des scènes, l'objectif pour filmer, le grain de l'image, la colorimétrie, l'étalonnage, les angles caméra, la grammaire visuelle, les costumes et accessoires, le bruitage et le mixage sonore, tout ici est pensé pour donner une identité visuelle forte et ventiler une puissance narrative singulière.
Techniquement et visuellement impressionnant, la narration par l'image est couplée d'une histoire matinée d'humour noir simple mais efficace avec des personnages attachants et détonants.
Volontairement caricaturaux, ils renforcent l'étrangeté et le fantastique du récit et sont portés par un casting au diapason remplissant chacun leur rôle à la perfection.
On pourrait d'ailleurs regretter que les membres du casting n'aient pas eu une plus grande carrière même si elles sont pour certaines tout à fait convenables.
Autre regret, le fait que la voie montrée par ce duo n'est pas trouvée de successeur et qu'elle ne se soit pas poursuivie avec le temps.
Elle aurait permis au cinéma de genre de s'émanciper de cette niche oh combien petite et par la même occasion de renouveler pleinement un cinéma français ronronnant pour ainsi lui montrer que l'on peut s'autoriser -même dans la comédie- à être plus audacieux en intégrant du fantastique et de l'étrangeté.
Voilà là ce que le cinéma français aurait du être.
Je le conseille vivement, ne serait-ce que pour découvrir un autre pan possible du cinéma français qui est malheureusement bien souvent méconnu du grand public.
A découvrir par tous.