Le ton léger du film, genre « l'air de ne pas y toucher », présente beaucoup d'intérêt : le racisme, quoi qu'on en dise, c'est toujours à prendre avec des pincettes et il est difficile de jongler entre la bien-pensance et l'évidence. Néanmoins Dear White People réussit plutôt bien la performance.
Pour entrer dans le film (aller savoir pourquoi j'y ai immédiatement vu du Wes Anderson, cela doit venir de la musique je pense, bien que la mise en scène va un peu dans le sens du réalisateur aussi), il faut d'abord comprendre des codes, qui pour les français sont pour le moins obscure, celui de l'université américaine. Il y a beau avoir une multitude de films américains sur le sujet, si on ne l'a pas vécu c'est toujours difficile d'y prendre part. Fort heureusement, le film se découpe comme une pièce de théâtre en plusieurs actes, avec en prime des cartons et inserts pour ne pas se perdre dans la présentation des personnages. Pièce de théâtre aussi par le cheminement de la ligne scénaristique, évoluant vers la dramaturgie, pas d'inquiétude cependant le film reste dans la légèreté.
Ce que je pourrais reprocher au film c'est son aspect un peu brouillon, on sent qu'il y a du potentiel et une envie flagrante de prendre plusieurs chemins, mais il faut savoir faire du tri. Aussi l'abondance des mots dessert parfois le film, peut-être que laisser une plus grande part à la mise en scène, passant donc par l'image, vaut plus que la logorrhée de paroles. Ce qui marche chez Woody Allen est ici parfois dur à suivre. De plus, le film reste assez américain dans son approche, non pas que le problème identitaire ne se pose pas au delà de l'océan, au contraire, mais il y a forcément de la culture américaine qui échappe à nous autres européens, pour comprendre toute la subtilité des dialogues.
Par contre j'ai trouvé les personnages bien travaillés, même si quelques clichés persistent, on sent une vrai élaboration dans l'écriture des personnages. Sans compter qu'au delà du racisme (même si il reste la base du film), Dear White People amène à réfléchir autant sur la position de la femme, que sur l'identité d'une jeunesse à construire tout en acceptant ses racines et se démarquant en traçant sa propre voie.
L'impact du film ne sera peut-être pas autant retentissant en France qu'en Amérique (même si cela ne veut pas dire qu'on a pas nos propres problèmes ici aussi) mais il a ce don de piqûre de rappel sur nos sociétés, sans prétendre le politiquement correct, que la bataille contre les préjugés n'est pas encore gagnée.

LuluCiné
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le 30 mars 2015

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