“Il y a l’éveil car il y a eu l’incinération des déchets dans l’étoile de son nom”

J’avoue m’être laissé emporté, sans trop réfléchir, dans cette avant-première de Poupelle, la combinaison fable écologique et animation japonaise me rappelant (nous rappelant tous je suppose) les plus belles histoires du père Miyazaki. Une erreur bien naïve je vous l’accorde, tant j’étais loin de me rendre compte des deux énormes barrières que sont l’âge et la culture. L’aspect culturel est certes moins visibles, on reconnaîtra cependant un humour (m’empêchant de rire avec les personnages) très marqué, ainsi qu’une narration et surtout un traitement du monstre (ce dernier étant le moins problématique). L’aspect petit enfant m’a cependant réellement arrêté dans mon élan. Soyons franc, je me suis ennuyé devant Poupelle, j’irai même jusqu’à dire que les 40 dernières minutes étaient pesantes. Mais il serait hypocrite de tout mettre sur le dos du film.


J’imagine que pour voir si un film convient aux enfants, il faut regarder l’avis des enfants, ça tombe bien, dans ma salle, on les entendait bien. Entre les rires du à l’humour grotesque (remarque, on rigole bien tous encore devant Bipbip et Coyote), les “Waou” avec la petite tension de fin et les applaudissements au moment des génériques, la conclusion est sans appelle, je suis un homme sans âme qui a perdu l’enfant qui était en lui (Saint Exupéry ne serait pas fier). Bon maintenant je le sais au moins, je me ramènerai avec une pancarte “vieux cinéphile aigri” la prochaine fois que je critiquerais un film pour enfant.


Malheureusement pour Poupelle, il y a des choses que je ne peux pas mettre sous le dos de mon cœur de pierre. C’est le premier film de Yusuke Hirota, qui d’habitude se voit assigner le rôle de chef des effets spéciaux, et ça se voit. C’est vraiment brouillon ; pour moi le moment qui le cristallise le mieux c’est son introduction : On pose un mystère, avec de la tension autour de la naissance d’un monstre de déchets, et point culminent on fait...une danse...longue...beaucoup trop longue. Et à partir de là ça faisait un peut comme si Poupelle avait toujours été là. Alors oui, je sais, on découvrira par la suite qui est réellement Poupelle, ce qui permet d’expliquer son adaptation rapide (enfin c’est plus sous entendu qu’autre chose mais passons) mais en attendant nous on ne le sais pas. Cet aspect brouillon est aussi présent dans les thèmes, on accumule écologie, famille, discrimination, totalitarisme, capitalisme et autre sans jamais essayer d’approfondir, ainsi les révélations familiales passent complètement à coté, le totalitarisme est négligé (et négliger l’aspect totalitaire d’un état que tu définis comme tel est problématique mais on y reviendra plus tard), le capitalisme est mentionné dans un flash-back et n’a aucun intérêt et le message idéologique est mélangé avec le totalitarisme ce qui le rend relativement douteux.


Finalement le seul problème de Poupelle, c’est qu’il est incroyablement brouillon. J’imagine (car je ne sais rien de l’œuvre originale) que le réalisateur/scénariste a voulu garder tout ce dont le livre parlait, hors quand on adapte un bouquin il faut savoir faire des concessions, au risque de rendre tout flou. Et c’est ce qui se passe, c’est une erreur de débutant certes, mais qui est assez visible, d’autant plus que le totalitarisme et le capitalisme sont des thèmes qui doivent être correctement traité, surtout si on parle à des enfants. Et ça se voit que c’est pour les enfants, même un peu trop. Je ne pense pas qu’un enfant soit non plus stupide, en tout cas pas au point d’ignorer un sous texte, ainsi la réaction littérale de la mère quant à la révélation sur son mari est quelque peu exagérée, tout comme le symbolique paternelle de Poupelle qui aurait pu être amené moins littéralement.
Le problème de vouloir trop en dire quand on a pas le temps c’est que ça en pâti inéluctablement sur le rythme ce qui va se révéler catastrophique sur certains points déjà bancale de l’œuvre. A aucun moment on ne ressent la peur liée à ce système que tout le monde à l’air de haïr, jamais on a peur pour Poupelle, ce qui est embêtant pour quelqu’un supposé être en cavale. Mais ce qui va le plus souffrir de tout cet amateurisme c’est les personnages et leurs alchimies, c’est incroyable à quel point, à part les deux protagonistes, on ne croit en rien, le reste n’est qu’un ramassis de personnages fonctions sous ou mal exploités. Je pense notamment à l’amie de la mère au lance flamme beaucoup trop cool mais jamais correctement traitée.


C’est dommage car tout n’est pas à jeter dans Poupelle, mais les erreurs s’attaquent précisément à ce que le film ne devait pas négliger : l’implication émotionnelle du spectateur. Alors oui, je vois tes qualités Poupelle, j’admire certaines de tes prises de risques, mais je pense qu’à l'heure d'aujourd’hui tout comme si je t’avais vu gamin, tu seras sorti de ma tête d’ici quelques semaines, car malgré tous tes efforts tu ne m’inspires rien de plus qu’une décharge à ciel ouverte.

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le 5 nov. 2021

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Lordlyonor

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