Allez hop, ça, c'est fait.

Pour commencer, disons le d'emblée : Notting Hill est clairement le meilleur Richard Curtis que j'ai vu. Le moins angoissant, le moins déviant, le plus sympathique. J'aurais probablement préféré Andy McDowell à Julia Roberts, déjà parce que le jeu de cette dernière est carrément limité, de son propre aveu d'ailleurs avec cette scène délicieusement méta où elle explique ce qu'elle doit subir pour rester belle tout en prophétisant qu'elle va vieillir, devenir de moins en moins séduisante et qu'à ce moment les producteurs se rendront compte qu'elle ne sait pas jouer. Oui, enfin ça n'explique pas totalement l'invisibilisation des femmes d'âge mur au cinéma, mais ok pour toi Julia ça marche. Soit, le film a beau être filmé sans grande ingéniosité, il est d'une impeccable beauté plastique et on rentre très vite dedans, avec une envie folle de vivre dans ce quartier de Notting Hill qui a l'air d'être le paradis du bobo. On a envie de flâner dans ces librairies, et d'y croiser, oh mon Dieu, Dylan Moran en voleur de livre !! (c'est autrement plus excitant que de croiser Julia Roberts nom d'un chien !) et de vivre dans une petite maison à la porte bleue. On se prend au jeu, Hugh Grant est trop mignon avec ses yeux bleus, sa bienveillance, son regard tendre, ses costumes négligé-chic qui donnent un bonus de +3 en charisme et on a sérieusement envie de lui faire des câlins quasi minute 5. Le récit, dans sa proposition est plutôt génial : inverser les genres dans le conte de fée, faire une sorte de "Pretty Woman" a l'envers et montrer la masculinité fragile d'un personnage qui n'est ni séducteur, ni prédateur mais qui, au contraire, n'est pas sûr de lui et subit son existence amoureuse avec désarroi. C'est frais, les personnages sont aussi caricaturaux qu'attachants (la soeur et le coloc, synthèse du pire et du meilleur de la caricature) et même si la musique est absolument horrible, l'univers esthétique tient la route. Mais, malgré tout ça, malgré cette installation confortable près des personnages, quelque chose ne va pas. Quelque chose me chiffonne, me dérange dans l'écriture et l'enchaînement des aventures amoureuses de la Belle et du clochard. Et, au risque de tout salir, ce qui ne fonctionne pas pour moi c'est ce prototype que représente William, ce prototype du "bon gars" qui mérite de séduire la princesse parce qu'il est "beaucoup trop gentil". Certes, on ne va pas faire le récit d'un tocard séducteur et c'est beaucoup plus intéressant de voir un homme tout en vulnérabilité qu'une caricature de mâle alpha étaler sa testostérone pour gagner le coeur de la belle, mais le problème c'est que dans ce film, si Will est parfaitement adorable, Anna se comporte comme LA DERNIERE DES GARCE avec lui et c'est profondément insupportable. Déjà, je l'ai déjà dit, mais l'interprétation de Julia Roberts est proche du néant, ce qui devient gênant quand elle doit donner du corps à son personnage pour que l'on comprenne ce qui crée l'attachement, au delà de sa beauté et de sa célébrité. Elle est "là", du moins son corps est présent, mais ses lignes de dialogue sont vraiment très limitées. A part durant la scène du dîner où on remarque qu'elle peut faire preuve de finesse, d'empathie et de bienveillance, elle se contente de regarder William, de le dévisager et ne dit quasiment rien. Quand elle ne se met pas à l'engueuler ou le rejeter sans raison. "Ah putain Anna, on vient de passer la journée ensemble, mais en fait tu avais un mec ? Bon pas grave." "Ah Anna, tu es vener parce que les journalistes sont venus nous faire chier au réveil et tu mets la faute sur moi ? Bah, pas grave." Le personnage survole absolument toutes les agressions, se contente de rester apathique et d'attendre la prochaine saute d'humeur de sa bien-aimée. Et plus il fléchi, plus il est séduisant. Bon, j'extrapole, je sais que ce n'est qu'une comédie romantique et qu'en plus, c'est le récit d'un "coup de foudre", qu'on est là pour rêver et pas pour rationnaliser le sentiment amoureux. A ce niveau là ça marche plutôt pas mal, dommage que ce que l'on attend dans grand final, c'est plus de voir William obtenir le succès qu'il mérite que l'accomplissement d'un amour.

Mr-Grama
7
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le 20 nov. 2022

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