Contes cruels de la jeunesse japonaise est le second film réalisé par Nagisa Oshima.

Je l'ai vu dans le cadre d'un festival Toute la mémoire du monde au Cinespace de Beauvais en version dîte restaurée, dans de magnifiques couleurs. Un expert du cinéma japonais a parlé du film en introduction. Et je dirais " heureusement " car ce n'est pas une oeuvre facile et je ne suis pas certaine d'avoir réussi à la regarder avec autant de détachement.

Car en effet, les relations auxquelles nous assistons entre une jeune fille japonaise et un jeune homme délinquant sont teintées de violences et de cruauté. Attirée par l'univers marginal ( en rupture avec la société traditionnelle et rigide d'alors ) du jeune homme et sans doute amoureuse, la jeune femme se laisse entraîner dans une spirale/un tourbillon de violences sexuelles et relationnelles imprégnées de sado-masochisme consenti.

J'ai trouvé le film dur et violent mais les explications initiales de l'enseignant spécialiste m'ont permis de la resituer dans un contexte politique et historique, ce qui évite les jugements moralistes et à l'emporte pièce sur ce film. Le personnage masculin est bien loin d'être sympathique mais la construction du film montre un processus de déconstruction des repères et le poids de la transgression dans une société très rigide et d'une certaine façon très violente par les entraves qu'elle oppose à une jeunesse qui se cherche.

De plus des sujets tabous sont évoqués de façon brutale, encore une fois en rupture avec les codes de l'époque : la prostitution, l'avortement clandestin, le viol et la perversité qui s'exerce dans cette société patricarcale au détriment des femmes.

Et si la descente en enfer est progressive, elle n'en est pas moins d'une extrême violence mais je ne vous en dis pas plus sur le fond.

Quant à la forme, impossible de s'ennuyer, la caméra effleure, balaye, s'attarde avec beaucoup de sensualité sur les corps, leurs détails, sur des regards...La scène où le jeune homme ( devenu proxénète ) mange une pomme penché vers le corps douloureux de sa maîtresse venant de se faire avorter tout eu ayant pris soin de poser une seconde pomme sur le cou de celle-ci est très réussie sur le plan esthétique et c'est aussi à travers ses yeux "fous" que nous devinons que la chute ne faisait que commencer.

Bref, la jeunesse japonaise peut vous sembler violente, mais il n'en est rien comparé à ce qu'elle fut, vue certes par le regard rebelle et contestataire d'Oshima dans les années 60.
Karine_Laine
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le 2 févr. 2015

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Karine Laine

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