On ne devrait jamais rencontrer ses idoles

Deux films espagnols de qualité vus en une semaine : devrais-je me pencher plus franchement sur le cinéma ibérique de ces dernières années ? En attendant, « Compétition officielle » séduit le plus souvent, notamment à travers son sujet et un scénario souvent habilement construit. Même si cela manque un peu de structure, de fluidité, donnant parfois l'impression d'un enchaînement de scènes, ces dernières sont souvent cocasses, cohérentes, nous permettant de suivre, mais pouvant manquer de liant. Pour autant, le duo Mariano Cohn et Gastón Duprat ne perd jamais de vue son objectif : une satire moqueuse et légèrement provocatrice sur le milieu du septième art et ceux le composant, sans pour autant être gratuite ou trop caricaturale, du moins beaucoup plus complexe qu'au premier abord.

C'est à mon sens la principale force du film : montrer l'absurdité de certaines démarches « artistiques », dénoncer les égos, voire une forme de cruauté des uns envers les autres, oui, mais faisant toujours en sorte d'argumenter, d'interroger sur ces différents aspects. Si on a effectivement du mal à saisir l'intérêt de certaines démarches, on peut mieux comprendre d'autres, un fond de vérité étant presque systématiquement présent dans les prises de parole, les situations, la vision des choses des différents protagonistes, laissant entrevoir, sous le grotesque, une vérité, celle des personnages, du cinéma en général et une vision montrant un réel amour pour le septième art, aussi excessive, décalée soit-elle.

Beaucoup de répliques aussi vachardes que savoureuses, offrant quelques scènes particulièrement réjouissantes, en compensant une poignée d'inutiles, faisant vraiment rajoutées, à l'image de l'utilisation médiocre du personnage de N. Clairement, Cohn et Duprat n'ont d'yeux que pour leur trio Penélope Cruz – Antonio Banderas - Oscar Martínez et on peut les comprendre : ils sont remarquables, la première prouvant à nouveau quelle grande actrice elle est devenue, leur offrant chacun l'un de leurs meilleurs rôles. Sans oublier un dénouement totalement dans le ton de l'œuvre, même si on peut douter de la pertinence de le faire durer aussi longtemps, pouvant toutefois se justifier par les dernières secondes. Peut-être un peu nombriliste, donc, ce qui peut paraître un comble au vu du sujet, mais aussi un titre osé, grinçant sur le monde du cinéma, cousin ibérique éloigné mais talentueux de « Ça tourne à Manhattan » : imparfait, mais souvent salutaire.