Douglas Attal s'est fait connaître avec le film Radiostars (produit par papa Alain), où il jouait un mec engagé pour écrire des vannes pour une émission de radio en perte d'audience. Si Attal continue de jouer dans quelques films, il ambitionne de réaliser. En 2009, il prend connaissance du roman Comment je suis devenu super-héros (Gérald Bronner, 2007) dans le magazine Comic box. Il commence à travailler sur une adaptation en compagnie de l'auteur en déplaçant l'action de New York à Paris.


Sentant que son projet allait vite avoir un budget gargantuesque, Attal fait plus d'une réécriture en compagnie de Melisa Godet, Charlotte Sanson et du réalisateur Cedric Anger. Attal dégage ainsi un passage dans le métro, un autre sur la place de la rotonde et réalise une démo de plusieurs scènes. Warner entre finalement en jeu et le budget avoisine les 12 millions d'euros.


Le casting ne fut pas aisé, car si Pio Marmaï et Leïla Bekhti disent rapidement oui, ce fut plus compliqué pour Swann Arlaud et Benoît Poelvoorde. N'étant pas du tout familier des super-héros, Arlaud a eu un petit temps d'adaptation avant de se dire que c'était faisable. Pour Poelvoorde, le problème est plus arrivé sur le tournage. L'acteur a évoqué que le tournage fut une expérience assez compliquée, ne savant pas comment jouer son personnage par moments, un super-héros téléporteur.


Le décor du commissariat a été retiré à la production en plein tournage, au point de devoir transformer en urgence une ancienne usine de boutons dans le 18ème arrondissement de Paris. L'équipe avait également le gymnase du théâtre de Trévise à sa disposition, mais une explosion est survenue le 12 janvier 2019 dans le coin, amenant là aussi à chercher ailleurs. Comme si l'histoire n'était pas si compliquée, Comment je suis devenu super-héros est devenu une arlésienne à cause de l'épidémie de covid-19. Devant sortir en octobre 2019, puis en décembre, en avril 2021, en mai, Warner refile finalement le film à Netflix alors que les cinémas s'apprêtaient à rouvrir.


L'ironie veut qu'il s'agit peut-être du meilleur film français distribué par Netflix. Si la plateforme a eu quelques films intéressants (citons Je ne suis pas un homme facile et La terre et le sang), Comment je suis devenu super-héros est clairement d'un autre niveau. De la volonté de son réalisateur, le film débute avant tout comme un polar où se trouve des super-héros. Principalement des retraités, d'autres qui se cachent en évitant de les utiliser et quelques uns découvrant de quoi ils sont capables. Une normalisation du super-héros dans la société avec des classements (ce qui vaut la présence d'un célèbre youtubeur dont on se serait bien passé), ses célébrités et la banalisation des pouvoirs (des gens qui poussent des objets par la pensée en pleine rue par exemple). Ce dernier aspect est d'ailleurs l'élément déclencheur du film, puisque des trafiquants kidnappent des supers pour commercialiser des drogues utilisant leurs pouvoirs.


Le méchant en chef pourrait être un banal trafiquant avide de pouvoir (au même titre qu'un baron de la drogue) si Douglas Attal ne lui donnait pas un peu plus de complexité en cours de route. D'où l'aspect polar amenant à cette découverte avec des policiers comme héros. Sans compter l'aspect héros / némésis rappelant Incassable (M Night Shyamalan, 2000) avec le super qui ne veut pas utiliser ses pouvoirs dans ses fonctions et celui qui veut en avoir et n'y a accès que par une drogue.


L'aspect policier n'empêche jamais d'amener des scènes spectaculaires. On pense à celle dans le commissariat ou au climax. Le film n'est peut-être pas assez radical, en comparaison de Watchmen (une des inspirations d'Attal) ou d'On l'appelle Jeeg Robot (Gabriele Mainetti, 2015). Ce qui l'empêche peut-être de gagner davantage en maturité.


En revanche, Attal réussit à bien croquer ses personnages. Car outre le héros et sa némésis, les super-héros joués par Bekhti et Poelvoorde permettent de voir d'autres aspects du milieu avec une héroïne aidant les jeunes et un héros malade devenant une sorte d'Oracle. Avec Marmaï, Vimala Pons forme un duo plutôt efficace typique du buddy movie. D'autant plus que les acteurs semblent croire à leurs rôles (y compris Poelvoorde plutôt émouvant dans son style).


Les effets-spéciaux sont réussis dans l'ensemble, même si le tout dernier plan est beaucoup moins reluisant (il ne semble pas fini ou trop cheap). Même si le film apparaît comme purement unitaire, il ne serait pas étonnant que Netflix et Alain Attal passent à la caisse pour une éventuelle franchise ou au moins une suite. Si Comment je suis devenu super-héros n'est pas le premier film de super-héros français, il risque d'être une date à sa manière dans le cinéma hexagonal.

Borat8
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le 3 août 2021

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