Close
7.1
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Film de Lukas Dhont (2022)

Close prétend aborder la question de l’amitié entre garçons en se gardant bien de nommer la chose, c’est-à-dire l’homosexualité chez les jeunes – très jeunes même, car les gamins n’ont que 13 ans. Besoin d’être ce que l’on veut sans nécessairement le nommer, c’est-à-dire nécessité vitale de liberté au-delà des mots qui enferment ? Besoin de laisser le temps construire la chose, sans précipitation, à un âge charnière où l’on franchit timidement le vaste champ de la sexualité ? Peur du regard de l’autre, qui juge et condamne ? Ou simple hypocrisie, voire esbrouffe du réalisateur se détournant finalement de la réalité des sentiments comme un gosse ?

Ce manque de clarté, dérivant de l’indécision du personnage de Léo, d’abord assez enclin à montrer à tous sa proximité physique (si ce n’est plus) avec son copain Rémi avant de rétropédaler, nuit beaucoup à la cohérence du propos. En effet, il était clair pour tous que ce qui unissait les deux garçons dépassait la simple amitié : le regard amoureux de Léo, la proximité physique dans le lit qu’ils partagent, leurs frôlements sensuels étaient tout sauf innocents et purement amicaux – au moins chez Rémi, personnage dont on suit plus les expressions.

Or, Lukas Dhont décide à un moment de prendre un chemin inattendu. Alors que l’on pouvait s’attendre à un logique coming out, le drame vient s’inviter. Et Dhont, trouvant vite ses coupables auxquels il avait pour ainsi dire déjà donné l’arme du crime pour mieux desservir sa théorie victimiste, décide de s’acharner sur une société trop conservatrice, jugeant les comportements amoureux des autres, ne tolérant pas les caresses et autres embrassades entre hommes (alors qu’entre femmes cela ne scandalise personne), avec des gamins n’acceptant pas encore l’homosexualité (ou la simple mais tout de même érotisée amitié masculine), ce qui justifie l’éloignement de Rémi qui soit ne veut subir de harcèlement scolaire – ce qui est tout à son honneur – soit se nie à être catégorisé « gay », soit doute de lui. Nous voyons donc le traitement de la question demeure confus de la part de Lukas Dhont, qui selon nous fait part d’une certaine lâcheté en ne disant pas les choses telles qu’elles sont.

Reconnaissons cependant son excellent travail de direction d’acteurs, les deux enfants étant troublant d’émotions semble-t-il non feintes, de même que les parents jouant eux aussi avec une justesse irréprochable. En ce qui concerne la mise en scène, elle souffre d’un scénario rachitique, obligeant dirait-on Dhont à faire des largeurs avec des plans vains et insignifiants, comme ces trop longues courses à travers champs et routes à vélo. Et que dire de cette insupportable alternance silence / cris, énorme anomalie sonore ?

En résumé, un film pas assez courageux, ne se donnant pas les moyens de son ambition.


5,5/10

Marlon_B
6
Écrit par

Créée

le 9 févr. 2023

Critique lue 19 fois

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Marlon_B

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