Circonstances atténuantes par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Gaëtan le Sentencier était un magistrat intraitable et d'une sévérité absolue or depuis sa récente retraite il ne peut s'empêcher, chaque jour, de revenir respirer l'odeur de la Grande Maison" dans laquelle il mena une brillante carrière. Il faut dire que chez lui il vit très mal les colères et les caprices de son épouse, une bourgeoise insupportable, obsédée par ses intestins. Après un départ précipité pour la cure annuelle, la voiture tombe en panne à une vingtaine de kilomètres de Paris. Sans leur chauffeur, parti rejoindre sa belle et sous l'orage, ils sont alors contraints de trouver un refuge. Ce sera un hôtel assez "borgne" où réside une bande de mauvais garçons malfaiteurs et leurs belles. Monsieur et Madame le Sentencier, d'abord gênés et méprisants envers ce milieu plus que louche, vont petit à petit finir par sympathiser et comprendre leur entourage à tel point que l'ancien magistrat va prendre en main les destinées des mauvais coups accomplis par ses nouveaux amis et se laisser séduire par certains d'entre eux. Tout allait bien jusqu'au jour où "la Panthère", une ancienne condamnée est libérée de prison et reconnaît le magistrat, lui qui n'avait pas hésité à alourdir sa peine...


Pourquoi vous parler de ce film qui n'est pas, loin s'en faut, l'un des plus connus du cinéma français. Tout simplement parce que je trouve qu'il reflète bien un certain style de cinéma d'avant guerre. Tout cela respire une certaine insouciance, une joie de vivre communicative et plein de bons sentiments et de moralité. D'un côté, des bourgeois rigides aux idées bien arrêtées sur les soi-disant convenances et ne se mêlant pas à la populace et de l'autre, des petits malfrats plus naïfs que méchants, hébergés par un brave aubergiste rusé et compatissant. Au milieu de tous ces gens règne leur égérie, très émancipée, Marie "qu'a d'ça" avec son franc parlé, ses combines mais aussi sa tendresse. Une osmose va finir par se créer entre tout ce petit monde fort différent, réuni dans cette auberge sous l'autorité bienveillante et rusée d'un aubergiste rigolard et douteux. Le couple aux bons principes va quelque peu s'encanailler avec ces mauvais garçons autour de bonnes bouteilles, de bon petits plats de la patronne accompagnés d'airs d'accordéon. L'attachement va devenir tel que Monsieur le Sentencier va prendre lui-même en main ,et à sa manière bien particulière, les agissements de cette petite bande de malfrats, devenant un héros jusqu'au jour où... Peu importe, il y a toujours moyen de finir par s'entendre et vivre heureux ensemble malgré les différences de classe et de culture.


Jean Boyer qui réalisa ce film sympathique plein de quiproquos et de drôlerie fit tourner les plus grandes stars de l'époque puisque Fernandel, Bourvil et même Brigitte Bardot passèrent également devant l'œil de ses caméras. Il est toujours bon de se retrouver comme autrefois à la campagne... à vingt kilomètres de Paris. Il est bon de retrouver cette petite auberge malfamée, peuplée de comédiens hors pair, au jeu certes très théâtral , tels que Michel Simon à contre-emploi ,sélect, obnubilé par le code pénal et devenu plus roublard que les voyous,et Arletty éblouissante de beauté et d'humanité, faisant étalage de son inimitable gouaille. Suzanne Dantès en épouse d'abord insupportable puis encanaillée ne manque pas de charme non plus. N'oublions pas des acteurs comme Andrex, Dorville et bien d'autres qui nous brossent avec beaucoup de talent des personnages typiques de cette l'époque qui allait malheureusement s'assombrir peu après. Pour couronner le tout, il y a la célèbre chanson de Georges Van Parys "Comme de bien entendu" qui fait chanter et valser nos joyeux lurons au son de l'accordéon. Le seul regret peut venir d'un final bâclé un peu niais et moraliste à l'extrême.


Voici donc un moment agréable à passer dans l'insouciance et le souvenir suranné d'actrices et d'acteurs aujourd'hui disparus. Ce film ne semble pas avoir été réédité et demeure donc assez oublié, c'est dommage...Toutefois avec beaucoup de chance, vous dégoterez peut-être une bonne vieille cassette pour vous faire tomber sous le charme et l'insouciance de cette époque révolue.

Grard-Rocher
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les bons films., Les films oubliés ou méconnus qu'il convient de redécouvrir. et Cinéma : Entrez dans le monde de la comédie.

Créée

le 31 mai 2016

Critique lue 1.3K fois

29 j'aime

22 commentaires

Critique lue 1.3K fois

29
22

D'autres avis sur Circonstances atténuantes

Circonstances atténuantes
Ugly
8

L'auberge canaille

Ce film tourné très rapidement en une quinzaine de jours, eut un joli succès et devint aussi célèbre que la chanson "Comme de bien entendu" écrite par Georges Van Parys et chantée par Arletty et...

Par

le 12 juil. 2018

11 j'aime

Circonstances atténuantes
Morrinson
7

♫ Elle se consola en le faisant cocu, comme de bien entendu ! ♫

Michel Simon magistrat à la retraite et sa femme, couple de bourgeois guindés et maniérés par excellence, se retrouvent coincés à la tombée de la nuit au fin fond de la cambrousse, dans une auberge...

le 10 sept. 2018

8 j'aime

Circonstances atténuantes
greenwich
7

Circonstances atténuantes (1939)

Il s'agit d'une comédie en noir et blanc. Gaetan le sentencier, un ancien procureur strict, part en vacances avec son épouse. Tombant en panne le couple trouve refuge dans un petit hôtel fréquenté...

le 4 oct. 2015

7 j'aime

1

Du même critique

Amadeus
Grard-Rocher
9

Critique de Amadeus par Gérard Rocher La Fête de l'Art

"Pardonne Mozart, pardonne à ton assassin!" C'est le cri de désespoir d'un vieil homme usé et rongé par le remords qui retentit, une triste nuit de novembre 1823 à Venise. Ce vieil homme est Antonio...

176 j'aime

68

Mulholland Drive
Grard-Rocher
9

Critique de Mulholland Drive par Gérard Rocher La Fête de l'Art

En pleine nuit sur la petite route de Mulholland Drive, située en surplomb de Los Angeles, un accident de la circulation se produit. La survivante, Rita, est une femme séduisante qui parvient à...

166 j'aime

35

Pierrot le Fou
Grard-Rocher
9

Critique de Pierrot le Fou par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Ferdinand Griffon est entré malgré lui dans le milieu bourgeois par son épouse avec laquelle il vit sans grand enthousiasme. Sa vie brusquement bascule lorsqu'il rencontre au cours d'une réception...

156 j'aime

47