Un scénar presque aussi obscur que celui du grand sommeil (difficile de détricoter et de relier ces histoires de barrages, et de familles)

Un titre qui laisse rêveur et perplexe (c'est vrai que le quartier de Chinatown n'est pas le centre du récit, mais que tout finit par y conduire inexorablement, jusqu'à la conclusion du film, et cette foule de chinois hagards, ultimes témoins nocturnes d'un sinistre spectacle qui dépasse tout le monde).

Une ville, la Los Angeles éternelle des 30"s, il y fait chaud, très chaud. On y étouffe, on suffoque, alors qu'il y est beaucoup question d'eau. Même la gomina des cheveux soigneusement lissés de Nicholson est en passe de fondre.

Un privé, archétype total du genre. A l'époque, Nicholson est maigre et ne fait pas encore du Louis de Funès, même si déjà on peut déceler son mythique sourire diabolique (j'ai revu récemment quelques extraits de "pour le pire et pour le meilleur", et en terme de cabotinage (jouissif et/ou exaspérant) c'est absolument hallucinant, c'est même plus une caricature à ce niveau. C'est le summum du jeu expressionniste, je pense que si Nicholson avait joué au temps du muet, il aurait pu en être la plus grande star).

Il en prend plein la tronche, la gueule tailladée, cognée de toutes parts, même couverte de sparadraps, il garde la classe, et soyons fous.. Il renverrait même aux oubliettes ce bon vieil Humphrey et ses films noirs pour papy (Non, je ne suis pas du tout fan du "Grand Sommeil", et je trouve sa réputation totalement surfaite, et ringardisée par un film de cette classe).

Une musique inattendue, car du génial Jerry Goldsmith qu'on connait surtout pour la science-fiction (star trek, alien, total recall entre mille autres..), appelé en remplacement catastrophe, et qui n'a eu que 10 jours pour composer, une pure merveille.. Quelques notes de trompette, un piano imparable, un verre de cognac à la main, une clope au bec, et on est plongé illico dans l'ambiance à la fois glamour et inquiétante d'un film prenant à souhait, qui revisite avec enthousiasme tous les codes du genre.

Un faux rythme, permanent. C'est lent, ça piétine, on essaye de se dépêtrer d'une mélasse pas possible, sans succès. La sensation constante d'être dans un rêve (cauchemar), accentuée par ces fondus au noir qui interviennent brutalement après chaque temps fort du film (en général quand Nicholson en prend plein la tronche d'ailleurs).

Bref la grande classe, et peut-être ce qui se fait de mieux dans le genre ?
KingRabbit
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Journal du roi lapin - Films (2013), Les Bandes Originales qui m'ont marqué, Les années 70, ça déboîte (Top 100) et vidéothèque 1974

Créée

le 23 oct. 2013

Critique lue 3.8K fois

76 j'aime

7 commentaires

KingRabbit

Écrit par

Critique lue 3.8K fois

76
7

D'autres avis sur Chinatown

Chinatown
Thaddeus
10

Les anges du péché

L’histoire (la vraie, celle qui fait entrer le réel dans le gouffre de la fiction) débute en 1904. William Mulholland, directeur du Los Angeles Water Department, et Fred Eaton, maire de la Cité des...

le 18 sept. 2022

61 j'aime

2

Chinatown
Mr-Potatoes
10

«Un pour tous, tous pourris»

Tous les fornicateurs/libertins/échangistes/politiciens d’expérience vous le diront : « Une c’est bon, deux c’est meilleur ! ». Riche de ce sage enseignement, c'est une critique non pas sur un mais...

le 6 oct. 2015

48 j'aime

5

Chinatown
Sergent_Pepper
7

Noir of the worlds

Visiter l’Amérique et y tourner ne suffisait pas à Polanski : se frotter au mythe du Nouveau Monde impliquait aussi d’aller investir les terres, au propre comme au figuré, de sa mythologie. De retour...

le 9 déc. 2020

28 j'aime

3

Du même critique

Les 8 Salopards
KingRabbit
8

Peckinpah Hardcore

Le film va diviser... Encore plus que d'habitude pour du Tarantino, mais sur le plan moral essentiellement, là où les précédents Tarantino décevaient également sur la forme, avec des films...

le 25 déc. 2015

259 j'aime

26

Batman & Robin
KingRabbit
9

Pourquoi j'aime (sincèrement) "Batman et Robin"

Je vois bien ce petit jeu qui consiste à se moquer plutôt méchamment et bassement de ce film en tournant en dérision tous ses côtés un peu débiles volontaires ou non. Mais j'aime vraiment bien Batman...

le 16 juin 2013

162 j'aime

25

Battle Royale
KingRabbit
7

Souvenirs de collège

Je me souviens, il y a une douzaine d'années, quand je n'étais qu'un collégien d'1m57, de la salle de perm, à la cour, jusqu'aux couloirs étroits menant au réfectoire, se murmuraient avec insistance...

le 8 sept. 2013

119 j'aime

5