sept 2012:

Nomdidjou, que cela faisait longtemps que je n'avais pas vu ce film! La belle édition Blu-Ray qui me tend la galette est trop attirante occasion pour s'y soustraire. Et donc me voilà redécouvrant cette pépite d'humour et de vigueur, réjouissante.

La comédie s'appuie bien naturellement sur un rythme endiablé, jazzy devrais-je dire, à l'image de ce qu'Hollywood a su faire de mieux dans le genre, voire a su instituer en tradition.

Souvent ce type de films est porté par des dialogues succulents. Or, le couple Diamond et Wilder est un des plus performants, ajustant à merveille ses saillies percutantes avec bonheur et un tempo explosif. Les répliquent tombent toujours juste, démontrant toute la joyeuse intelligence de leurs auteurs.

Et quand ces dialogues sont servis par des acteurs aussi chevronnés que les deux loustics mâles (Tony Curtis et Jack Lemmon) et la belle -et néanmoins fanée- Marilyn Monroe, cela donne quelque chose d'assez irrésistible.

Ce film comme tant d'autres de Wilder est un chant d'amour à la vie : les immenses efforts que mettent les deux jazzmen à échapper à la vindicte de la mafia paraissent aussi vifs que ceux des deux auteurs à dégainer les bons mots et les situations les plus abracadabrantesques. Le scénario est en effet tellement tarabiscoté qu'on peine à croire qu'il soit finalement aussi bien ficelé, si lisible et coulant, naturellement, sans l'ombre d'un doute : magie des grands auteurs. Un bien bel athlète que ce scénario dynamique et équilibré qui nous assure un spectacle remarquablement agréable. Je me demande qui pourrait trouver à redire.

Ce classique de la comédie américaine est si célèbre que son histoire est à peu près aussi connue : les affres de Wilder devant le délabrement alcoolico-dépressif de sa star, Tony Curtis en profitant pour connaitre bibliquement celle sur qui tout le monde fantasme, celle qui est complètement dévorée par l'image érotique qu'elle a elle même construite. Et cette connaissance est un peu gênante parce qu'elle pare les revoyures d'un costume finalement différent : on voit par exemple que Marilyn n'est plus aussi étincelante qu'auparavant. Le blu-ray à ce propos n'épargne rien : les gros plans sur son visage ne laissent pas échapper ce vide qu'on sent un peu malade dans le regard de cette femme trop malheureuse.

Et pourtant, elle parvient, on ne sait comment, à jouer un personnage. Il est vrai que l'histoire de Sugar fait un drôle d'écho à la vie réelle de la comédienne. Du coup, certaines de ses phrases sonnent inévitablement "véridique". Une émotion particulière s'en dégage, d'un pathétique attendrissant, mais un poil voyeuriste aussi, qui rend un peu mal à l'aise. Malgré l'alcool la dame est encore belle, oui, elle s'empâte, mais la chair lui va bien, ni dissipe en aucune manière l'envie qui vous prend de la protéger. C'est pourquoi il est toujours un peu difficile d'entendre les joies de coq donjuanesque d'un Tony Curtis ou les plaintes logistiques de Wilder.

Malgré toutes ces épines dans le pied, les personnages restent incroyablement alertes et attachants. La danse n'est pas macabre. Bien au contraire, cette espèce de course poursuite à laquelle ils se livrent ressemble fort à une lutte pour survivre. Avant et après le clap, ce film est très causeur, il parle, il dit des choses qui laissent songeur.

Je ne sais pas si d'aucuns ont réfléchi à cette histoire de travestissement. Oh, j'imagine bien que oui, le cinéma a plusieurs fois misé sur ce thème comique. C'est quelque chose qui ne m'inspire pas grand chose. Je ne sais pas ce que cela peut vouloir dire, et pourtant, à voir ce film, j'ai l'impression qu'il y a là un procédé pas bête, avec une certaine dose d'humanité, bien plus que de féminisme d'ailleurs, qui transpire. Je le mesure mal, mais j'ai l'impression que c'est important. Surtout que c'est bien fait, pas trop, juste ce qu'il faut... un scénario divin, qu'je vous dis!
Alligator
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le 20 avr. 2013

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Alligator

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