
Un éblouissement.Conteur d’histoires dans la lignée de Maupassant et de Mérimée, Jacques Becker fut peut être le plus français des cinéastes.Le point de départ de ce joyau du cinéma des années 50 est emprunté à la chronique judiciaire de la belle époque.Mais Becker a profondément idéalisé les personnages et donné à l’aventure les dehors d’une complainte à la Bruant.Le ton est donné par la musique du « temps des cerises », chantée par un chœur de mendiants et reprise en accord final.On bascule peu à peu de la vignette d’époque dans l’épure dramatique. La vie quotidienne du temps est assez fortement stylisé mais ne tombe jamais dans la parodie ; la précision chirurgicale de la reconstitution ne vient à aucun moment étouffer la souffle de la fresque (ce que l’on peut parfois reprocher à Visconti), bien au contraire.Cette résurgence du réalisme poétique évoque aussi bien les films primitifs de Zecca ou de Feuillade que la « Belle Equipe » de Duvivier.Becker y ajoute surtout son humour, sa sensibilté, ce sens de l’ouvrage bien fait que l’on trouvait déjà dans ses films antérieurs mais qui apparaitra surtout de manière très nette dans « Touchez pas au Grisbi », sans atteindre un aussi haut degré de poésie.