Welcome to the jungle


Depuis que je n'ai plus de télé, je ne supporte plus mes voisins. Si l'idée d'un déphasage croissant avec l'entourage peut se révéler naturellement, je pense surtout mettre en cause mon refus de subir ce que je n'ai, à priori, pas envie et, surtout, pas besoin de voir. Ainsi, il n'y qu'un pas pour associer l'idée avec celle de ne pas supporter de subir ce que je n'ai pas envie, et pas besoin, d'entendre. Quitte à passer pour un irascible, je ne vais pas tenter de placer un barème de ce qui est tolérable et ce qui l'est moins mais j'ai une notion raisonnable des bruits naturels et de ceux qui sont évitables avec un minimum d'efforts.
Malgré ces points de réflexion, L'impression dominante reste toujours ce sentiment que le flux de ce(s) média(s) offre(nt) un support continu facilitant l'acceptation du désagrément, le reléguant rapidement dans le passé en accélérant la transition de pensée vers le prochain spot, scoop, buzz ou autres incongruités sonorico imagées.


Si on ajoute à cette longue intro le fait d'être un père ayant énormément d'influence sur mes enfants, le pitch de ce film me parlait depuis bien longtemps et je me suis résolu à l'acquérir ne trouvant pas de moyen alternatif pour le voir.


Paradise City


D'entrée, la première scène nous confronte tous à la réalité de notre terrain sociologique. En suivant l'ainé chasser, camouflé tel Rambo au Viet-Nam, le film nous installe dans notre salle climatisée, sirotant notre glace après avoir mangé un demi poulet et un coca pendant que le père de famille intronise son fils dans l'age adulte devant la dépouille, abattue précédemment à l'arc.
Tout de suite après, le ton de l'histoire est donné quand Daddy dispense ses ordres à sa tribu avec une autorité naturelle et interrompt immédiatement le processus en provoquant une bataille d'eau apaisant une tension pas forcément flagrante mais présente, surtout sur les plus jeunes.


Le décor est donné, une petite famille vit en quasi autarcie au milieu de la pampa. L'éducation dispensée, parfois militaire, parfois pointue scientifiquement ou philosophiquement tente de parfaire l'apprentissage de la génération en devenir. Seul petit hic, le tableau n'est pas complet. Comme dirait Dupontel dans Bernie, "Where is mum?"


You're crazy


Je ne sais pas si Matt Ross a des enfants mais il faut quand même avouer que quand il creuse le mode d'éducation prodiguée, cela apparait invraisemblable ou même fantasmé. Si je comprends l'idéal du patriarche respecté qui n'a que des consignes à diffuser pour qu'elles s''accomplissent mais qui sait aussi donner amour, instruction, détente et plaisirs culturels, ne pas prendre en compte le caractère des enfants dès le plus jeune âge montre la tâche de l'éducation parfaite un peu trop facile. N'empêche qu'on est dans un film, que tout ne doit pas être forcément vraisemblable et que ça aide vachement bien quand c'est une des figures les plus emblématiques du cinéma des trente dernières années, j'ai nommé Aragorn, qui dirige les opérations.


Alors, je ne vais pas détailler l'histoire mais je dois avouer qu'en tant que parent d'enfants normaux, déjà en bonne santé pour mon bonheur mais aussi sans potentiels intellectuels présumés gigantesques sans sensibilités exacerbées sans tralala me permettant de me mettre en valeur à travers eux, je pourrais me sentir mal à l'aise devant cette parade d'enfants extraordinaires dans la théorie. D'ailleurs, si on ne va pas chercher trop loin, on pourrait trouver pathétique la scène dans laquelle Grand Pas demande à comparer le savoir d'une de ses filles avec celui de son cousin
Mais là n'est pas le propos du film, car toujours et encore, ces clichés vont alimenter le discours qui commence à pointer le bout de son nez.


Sweet child o' mine


Bien sûr, le commun des mortels est naturellement conscient que le simple fait d'élever des enfants en autarcie ne peut être une bénédiction pour ces derniers qui devront tôt ou tard s'expérimenter dans le grand bain de la civilisation. Le film n'élude pas ce fait complètement mais ne s'y attarde pas non plus, et pour cause. D'emblée partager ses enfants avec la communauté, c'est déjà un peu les perdre au profit d'une société suceuse de sang.


Au fur et à mesure de l'histoire, on va comprendre pourquoi le couple de parents en est venu à cet extrême. Si une idéologie anti consumériste est souvent avancée, on comprend le repli comme une manière de s'opposer à l'alimentation du système en fournissant ses enfants. Le roi du Gondor en est conscient, la fatalité jouera son rôle bien assez vite et la meilleure des éducations ne suffira peut être pas à affronter tous ces sauvages. Il n'empêche que de préserver les siens un maximum est un réflexe de bon sens. La situation de départ, autant extrême soit-elle, est une chose qu'on verra très difficile à préserver et les efforts consentis, par le père de famille joué par Viggo Mortensen, pour faire évoluer la situation sans se renier, rend le personnage fantastique.

Toshiba
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le 13 sept. 2019

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